jeudi 8 novembre 2012

DE LA LECTURE À LA PRATIQUE ... Modèle d'analyse transactionnelle




Modèle d’analyse transactionnelle

Stewart, I. et V. Joines (2005). Manuel d’analyse transactionnelle. Paris : Interéditions. ISBN : 2100492020





Recension d’ouvrage réalisée par :

Chantal Simoneau, étudiante à la maîtrise en carriérologie, UQÀM
Joëlle St-Pierre, étudiante à la maîtrise en carriérologie, UQÀM

Sous la direction de :
Louis Cournoyer, Ph.D., c.o.
Professeur (counseling de carrière
Université du Québec à Montréal





1.    Comprendre les transactions interpersonnelles


Les interactions humaines regorgent de complexité et plusieurs personnes ressentent le besoin de  comprendre leurs relations pour ainsi se découvrir individuellement. Certains d’entre eux ont le besoin d’être accompagné dans la découverte de leur identité et dans la compréhension de leurs transactions interpersonnelles, ce qui les amène à consulter. À la fin d’un processus thérapeutique, les professionnels de la relation d’aide souhaitent tous que leurs clients repartent avec une panoplie d’outils et que ce travail leur permettre d’être autonome. Différentes approches et courants existent et proposent différentes lunettes avec lesquelles il est possible d’orienter son intervention. L’analyse transactionnelle est une approche permettant de comprendre le fonctionnement psychologique des clients dans le but de les rendre autonomes. Que ce soit en tant que psychothérapeute, psychologue ou conseiller d’orientation, un des aspects les plus importants du travail est de faire en sorte que le client se connaisse davantage, qu’il soit en mesure de décoder son comportement pour ensuite faire des changements. Les relations interpersonnelles sont complexes, car les individus sont complexes. Chaque personne possède son bagage personnel, son enfance, ses difficultés et ses émotions. Chaque personne est unique et possède sa propre subjectivité. Pour Stewart et Joines, « l’analyse transactionnelle est une théorie de la personnalité et une psychothérapie systématique en vue d’une croissance personnelle et d’un changement personnel ». Ce texte a pour sujet le Manuel d’analyse transactionnelle  de Ian Stewart et Vann Joines publié pour la première fois en 1991 (réédité en 2005).


2.    Qui sont Ian Stewart et Vann Joines ?


M. Ian Stewart est codirecteur de The Berne Institute en Grande-Bretagne en plus d’être un formateur accrédité par l’Association internationale d’Analyse transactionnelle (IATA). Il œuvre  comme psychothérapeute en analyse transactionnelle depuis plus de trente ans et utilise cette approche comme sujet de formations à travers le monde entier. Il agit aussi comme maître praticien en programmation neurolinguistique (PNL). Pour souligner son travail, en 1998, il s’est vu nommé récipiendaire de la médaille d’or de l’Association européenne d’Analyse transactionnelle (EATA). M. Vann Joines est un psychologue clinicien travaillant depuis plus de 30 ans en Caroline du Nord aux États-Unis. Il est président et directeur du Southeast Institude for Group and Family Therapy. Il est certifié comme formateur pour l’analyse transactionnelle. En 1994, il s’est vu décerner le prix Éric Berne par l’Association internationale d’Analyse transactionnelle (IATA). Il est conférencier, auteur et enseignant et sa renommée l’amène à donner des ateliers à travers le monde. Ces deux auteurs unissent leur travail et ont rédigé le Manuel d’analyse transactionnelle, approche préalablement fondée par Éric Berne en 1957.  D’ailleurs, les auteurs dressent la biographie de Berne au dernier chapitre de leur livre. Cet ouvrage met en lumière la théorie et la pratique de l’analyse transactionnelle et a été publié en 1991.

3.    Compte-rendu commenté de l’ouvrage de Stewart et Joines (2005)


Le livre compte 394 pages divisées en 30 chapitres sous lesquelles sont présentées sept grandes rubriques. Le chapitre 1 est consacré à une présentation de l’analyse transactionnelle. Les chapitres 2, 3, 4, 5 et 6 abordent la représentation de la personnalité et donc les différents modèles des états du moi en lien avec la structure et la fonction du moi. Quant aux chapitres 7, 8 et 9, ils traitent de la communication et de l’impact des transactions, des strokes et du temps dans les interactions que l’individu a avec son environnement. Les chapitres 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16  présentent l’origine et la construction du scénario de vie de même que son impact sur le présent. Les chapitres 17, 18, 19 et 20 traitent davantage de la façon dont un individu peut travailler avec son scénario existant pour le faire coexister avec sa réalité, voire même l’enrayer. Les chapitres 21, 22, 23, 24 et 25 abordent les croyances des individus en lien avec les scénarios alors que les chapitres 26, 27, 28, 29 et 30 concluent en faisant état de l’analyse transactionnelle dans sa raison d’être, dans son histoire, et aussi dans ses champs d’intervention.

Le chapitre 1 s’intitule Ce qu’est l’analyse transactionnelle. Pour Stewart et Joines, l’analyse transactionnelle (AT) est définie comme étant une approche psychologique. L’AT est abordée sous trois angles théoriques soit; la personnalité dont la compréhension se fait à partir des trois états du moi nommé Parent, Adulte et Enfant ; la communication et finalement, le développement de l’enfant. La théorie de la communication est, en quelque sorte, un prolongement de la théorie de la personnalité en ce sens où l’individu communique avec son environnement en utilisant un des états du moi et par conséquent, cela créera une interaction avec son environnement. Cette interaction est appelée transaction et alors que le stroke se définit à un état ou un signe de reconnaissance. Quant à la théorie du développement de l’enfant, elle fait appel à la notion de scénario de vie qui se construit dès l’enfance et qui se poursuit tout au long de la vie de l’adulte. Dans sa pratique, le conseiller d’orientation devra être attentif à ces scénarios afin de les communiquer à son client pour ne pas nuire à la démarche d’orientation.

Le chapitre 2, Le modèle des états du moi, aborde le sentir, l’agir et le pensé. Les auteurs conçoivent qu’à travers ces trois affects, l’individu manifestera des comportements associés aux états du moi appelés Enfant, Parent et Adulte qui composent la personnalité. Ces trois états du moi sont d’ailleurs représentés sous forme de diagramme appelé « diagramme structural de premier ordre » et donne naissance à des signes comportementaux observables. Selon Éric Berne, chaque état du moi est défini par un ensemble de comportements et peuvent interagir au même moment selon la situation vécue par l’individu. L’avantage relatif de la théorie de Berne est que le conseiller peut appuyer ses interventions sur du concret, des comportements visibles et des schémas identifiables qu’il pourra aisément expliquer au client afin que ce dernier puisse le cas échéant, en prendre connaissance et les irradier. Le client peut donc continuer à travailler sur lui-même en dehors de ses rencontres avec son thérapeute.

Le chapitre 3, intitulé Analyse fonctionnelle des états du moi, met en lumière de façon plus spécifique les composantes de la personnalité. En fait, les auteurs reprend le diagramme structural et le subdivise selon deux critères : la structure et la fonction du moi. Il est donc possible de comprendre le comportement d’un individu que s’il est analysé selon son processus (structure) et son contenu (fonction). Il met en lumière comment et dans quelle circonstance l’individu utilise ses différents états du moi. L’intérêt de l’analyse fonctionnelle s’inscrit dans la possibilité d’identifier l’état du moi utilisé par le client et de vérifier si cet état est approprié à la situation et le cas échéant, corriger les schémas faisant apparaître ses mauvais états du moi.

Le chapitre 4, Modèle structural de second ordre, aborde pour sa part l’autre facette des états du moi, la structure de la personnalité. Les auteurs font référence aux sentiments, comportements et souvenirs provenant de l’enfance, emmagasinés dans notre mémoire et qui non seulement se traduisent de manière particulière dans notre personnalité à travers les états du moi, mais dictent les comportements dans le présent. La structure de second ordre est complexe, car il est expliqué que le Parent et l’Enfant constituent plusieurs niveaux d’état du moi qui permettent d’éclaircir de quoi est composée la personnalité. Les inférences du passé composent le contenu d’un état du moi en y insérant non seulement le message, mais aussi, le messager. Le diagramme structural est intéressant puisqu’il brosse un tableau complet de la personnalité du client en termes de contenu, mais permet aussi d’accéder à son monde intérieur et antérieur de manière à comprendre sa composition pour éventuellement la modifier.

Le chapitre 5, Identifier les états du moi, fait état de l’utilisation de quatre types de diagnostic permettant de reconnaitre l’état du moi utilisé par le client. Selon les auteurs, en tête de liste se trouve le diagnostic comportemental puisque c’est à travers ce dernier qu’il sera possible de faire des inférences sur les états du moi employés par l’individu. Les trois autres diagnostics soit le social, l’historique et le phénoménologique servent de points d’appui au diagnostic comportemental puisque chacun à leur manière, ils confirment l’état du moi fonctionnel. Dans un processus de cheminement ou de réorientation de carrière, être capable de déceler l’état du moi fonctionnel peut s’avérer être bénéfique afin de faire les bons choix et s’assurer que l’état du moi du client est en congruence avec ses fonctions ou ses responsabilités.

Le chapitre 6, Pathologie structurale, les auteurs font état de deux conséquences possibles advenant le cas ou un individu renie un ou deux états du moi, ne fonctionnant en l’occurrence qu’avec un seul, ou encore s’il mélange deux des états du moi. Ce phénomène est nommé par Éric Berne extermination dans le premier cas et contamination dans le second cas. Dans l’AT, on prend comme postulat que pour fonctionner efficacement, l’individu doit faire appel à ses trois états du moi en fonction de la situation, mais aussi, en réponse à l’environnement. L’extermination générerait un conflit intérieur reflété dans les pensées, les actions et les comportements de l’individu. Dans le second cas, la contamination se vit lorsqu’un ou deux des états du moi est envahi par le contenu d’un autre état du moi. Il va sans dire que la réflexion est pertinente puisque nous évaluons les autres et le monde à partir de ce que nous sommes (le contenu) et que notre interprétation de ce monde s’en voit altérer. Il est donc primordial d’être en mesure d’identifier les pathologies dans le but de, par la suite, travailler sur les comportements et les pensées du client.

Le Chapitre 7, intitulé Transactions traite de la communication et plus particulièrement du stimulus et de la réponse transactionnelle reliée à la communication. Les transactions peuvent être complémentaires, croisées ou cachées. Dans la transaction complémentaire, les échanges se font toujours de manière parallèle entre les états du moi.  Les auteurs soulignent que, dans la transaction complémentaire, il y a une notion de but visé. Par but visé, nous entendons l’état du moi visé par le stimulus transactionnel. Dans le cas contraire, nous dirons que la transaction est croisée. Mon stimulus transactionnel s’adressait à un état du moi précis et mon interlocuteur pour sa part, me répond non seulement à partir d’un autre état du moi mais, s’adresse à son tour, à un état du moi en particulier. En ce qui a trait à la transaction cachée, son contenu a la particularité d’être à deux niveaux; social et psychologique. Si nous nous en tenons qu’au mot exprimé dans la transaction, le niveau est social. Par contre, si nous rajoutons aux mots les expressions non verbales, nous obtenons le niveau psychologique. L’avantage de l’AT est qu’elle aide le client à comprendre son mode opératoire autant au niveau du stimulus que de la réponse transactionnelle et de ce fait, elle permet de modifier les échanges transactionnels afin qu’ils soient équilibrés.

Le chapitre 8, Les strokes, traite du besoin de reconnaissance qu’ont les individus. Ils peuvent être verbaux, non verbaux, positifs, négatifs, conditionnels ou inconditionnels. Ce besoin de reconnaissance se vit au quotidien. Éric Berne décrit ce besoin de reconnaissance comme étant une manière de sentir que notre existence est reconnue par les autres. Ce besoin peut aller jusqu'à considérer les stokes négatifs ou conditionnels comme étant une alternative préférable plutôt que de ne rien recevoir. Dans cette quête d’être reconnu, l’individu peut aller jusqu’à adapter son comportement afin de s’assurer de recevoir les strokes dont il a besoin pour continuer d’avancer.  La compréhension du concept de stroke donne un sens à ce que nous ressentons lorsque nous en recevons, mais aussi, lorsque sans même le savoir nous en donnons. Il est intéressant de comprendre que le sentiment intérieur ressenti dans ces moments est en lien avec notre désir d’être reconnu comme un ÊTRE. De ce fait, nous avons la capacité de filtrer les strokes qui ne cadrent pas avec l’image que nous avons de nous-mêmes, et ce, probablement afin de nous préserver.

Le chapitre 9 intitulé Structuration du temps, aborde la manière qu’ont les gens de structurer le temps lorsqu’ils se retrouvent à deux ou plusieurs. À travers ce phénomène de passer le temps, il y a un lien à faire avec les strokes et les états du moi. Chacun des six modes de structuration du temps (retrait, rituel, passe-temps, activité, jeux et intimité) réfère à un ou deux états du moi particulier. De plus, chacun des six modes de structurations du temps réfère aussi à un type de stroke prédominant en lien bien entendu avec l’état du moi sollicité. La structuration du temps est intéressante puisqu’une fois tous ces liens mis en lumière, elle permet de comprendre le sentir, l’agir et le penser des gens en interrelation permettant ainsi d’identifier des racines de leurs comportements.

Le chapitre 10 intitulé Nature et origines du scénario de vie, traite de la mise en place de l’histoire de vie de l’individu. En effet, selon la théorie AT, dès la naissance, l’enfant emmagasine les informations nécessaires à la formation de son scénario de vie avec l’appui de son environnement. Parmi les points à soulever, notons que l’enfant réalise son scénario d’un point de vue stratégique en vue de pouvoir survivre dans son monde. L’acteur principal du scénario de vie, l’adulte, modulera son comportement en fonction des décisions et des bénéfices posés par l’enfant jadis, lors de la construction dudit scénario.

Le chapitre 11 a pour titre Comment se vit le scénario et fait état du principe que l’individu peut vivre son scénario de trois manières ; gagnant, perdant et non gagnant. De ces trois crédos découle un fait immuable ;  l’atteinte du but fixé et le degré de bien-être en relation avec l’atteinte ou non, de ce but. Selon l’AT, un scénario peut être changé et, pour ce faire, nous devons identifier les moments où l’individu glisse inconsciemment dans son scénario et où les stratégies utilisées dans le présent sont celles de l’enfance. Éric Berne parle de signaux scénariques comme étant un indice important signalant que l’individu est dans son scénario. C’est à travers l’identification de ses moments que nous serons en mesure d’identifier et de comprendre les schémas de vie des individus. Mentionnons que le scénario est une stratégie de l’enfance mise en place afin de répondre au revers de l’environnement. Dans cette perspective, il est difficile d’être en désaccord avec le concept de scénario de vie avancé par les auteurs, puisque nous savons pour en avoir fait l’expérience, que nos réactions face à un agent stresseur sont souvent les mêmes, ce qui confirme non seulement la présence de schémas, mais aussi son utilisation.

Le chapitre 12 intitulé Position de vie, traite de la valeur intrinsèque que le jeune enfant s’accorde de même que sur le monde qui l’entoure et qui servira de certitude lors de la construction de son scénario. Les auteurs présentent quatre positions qui sont possibles : je suis OK ou je ne suis pas OK ; vous êtes OK ou vous n’êtes pas OK. Dépendamment de la position adoptée, le comportement qui s’en suivra aura pour but de confirmer cette position. Tout comme le scénario, la position de vie peut être modifiée. L’individu a d’abord sa position de vie initiale avec laquelle il construira son scénario de vie et qui déterminera le type de relation sociale qu’il entretiendra avec autrui. Il est aisé d’observer à travers la grille d’analyse des changements de position de vie (l’enclos OK) imaginée par Franklin Ernst, la relation entre la position de vie et les relations sociales adoptées de même que le déplacement possible à l’intérieur de l’enclos OK lorsqu’il y a un désir de changement chez l’adulte.

Le chapitre 13 se nomme Message scénarique et matrice de scénario, traite de la nature du message et de sa transmission par l’enfant. Les prémisses des messages scénariques sont les signes non verbaux perçus par l’enfant (bébé). Selon Stewart et Joines, n’ayant pas la capacité de langage, l’enfant perçoit et interprète les signes non verbaux de ses parents et de l’environnement physique dans lequel il évolue. Ainsi, tel que vu dans la matrice de scénario apporté par Steiner, l’enfant aura emmagasiné la perception qu’il a le droit d’exister et d’être aimé (permission) ou inversement (injonction), que ce droit ne lui est pas acquis. De ce fait, il composera son scénario de vie. La matrice de scénario est intéressante puisqu’elle met en lumière les états du moi des parents et leur impact sur le développement des états du moi de l’enfant. Par ailleurs, il est possible de constater que bien involontairement les parents envoient dans ce qu’on pourrait appeler communément l’éducation, une abondance de règle (contre-injonction) que l’enfant  intègre sous forme de contre-scénario apportant la connaissance du monde qui l’entoure, mais, aussi, ayant un impact ou positif ou négatif sur le développement du scénario de vie dépendamment de son contenu.

Le chapitre 14 nommé Injonctions et décisions, reviens sur le concept d’injonction vu au chapitre précédent. Les injonctions ont été répertoriées par Bob et Mary Goulding au nombre de douze et formeraient selon eux, la base des décisions précoces. Dans sa matrice de scénario, l’enfant peut avoir reçu des injonctions de son père ou de sa mère et décider de les intégrer ou non dans son scénario de vie. Dans un cas comme dans l’autre, la finalité est la même : la survie et le mieux-être. Il est intéressant de noter que dans ce chapitre nous abordons pour la première fois la notion de rébellion et c’est sous le concept d’antiscénario que cette notion nous est présentée. Ce dernier se caractérise par le fait que l’individu utilise de manière inverse ses messages scénariques.

Le chapitre 15 intitulé Processus scénariques, traite des principaux schémas de processus scénariques possible indépendamment de l’âge, du sexe ou de la nationalité. Ces scénarios sont au nombre de six : avant, après, jamais, toujours, presque et sans fin. Non seulement ces scénarios peuvent régir le rapport au temps qu’entretient un individu, mais aussi, pour certains de ces scénarios, ils introduisent une notion de conséquence, d’insatisfaction, de pattern, de poursuite sans fin et d’éternel recommencement. Par ailleurs, même si l’un des scénarios est prédominant chez l’individu, nous avons en nous les six processus scénariques et se traduisent dans le comportement de l’individu ainsi que dans son langage. Ils sont donc facilement identifiables. Tout comme dans le scénario vu dans le chapitre 11,  les schémas de processus scénariques peuvent être remplacés par de nouveaux, apportant ainsi à l’individu une plus grande satisfaction et un mieux-être. Ce n’est que par l’état du moi Adulte que cette opération sera possible. Le processus scénarique est intéressant puisqu’il permet l’identification du schéma qui est le nôtre, mais ils n’ont pas la même portée au niveau des conséquences. Un schéma avant ou après peut s’inscrire dans une hygiène de vie alors que les quatre autres pourraient amener l’individu à entretenir des idées négatives sur lui, sa performance ou sa vie en général et avoir des conséquences importantes autant au point de vue personnel que professionnel.

Le chapitre 16 intitulé Drivers et miniscénario, traite d’une découverte faite par Taibi Kahler qui  nota que les individus faisaient état d’un ensemble de comportements verbaux et non verbaux signalant qu’ils étaient sur le point d’accéder à leurs comportements scénariques.  Nommé driver, cet ensemble de comportements est intimement lié au schéma de processus scénarique. Par ailleurs, les drivers seraient liés à la position de vie de l’individu en ce sens ou ce dernier à la perception - qu’il sera OK à la condition que… - suivit des drivers ; sois parfait, fais plaisir, sois fort, fais des efforts, dépêche-toi. Nous pourrions simplifier en disant que les drivers et les scénarios procurent l’immunité au niveau du sentir (émotion). Tant que l’individu applique un driver, je suis OK si, il se soustrait des sentiments négatifs découlant des injonctions reçues dans son enfance. À l’opposé, s’il ne réussit pas à maintenir son driver, l’individu fera l’expérience de sentiments parasites (culpabilité, impuissance, colère, etc.) selon le miniscénario qui lui est propre.  Expliqué ainsi, il serait légitime de penser que les drivers et les miniscénarios sont le point culminant de la personnalité d’un individu puisqu’ils teintent à la fois la pensée profonde de l’individu, mais aussi le comportement qui en découle et ce, même le comportement a des incidences sur les transactions de l’individu.

Le chapitre 17 s’intitule Méconnaissance et aborde ici le concept de méconnaissance défini comme une « omission inconsciente d’une information utile à la résolution de problème » et se produit lorsqu’une personne emprunte son scénario au lieu de se servir de ses capacités adultes. Cette distorsion de l’environnement est un processus intérieur inobservable de l’extérieur et est dite passive, car l’individu subit son environnement au lieu de prendre action. D’une façon inconsciente, l’individu réagit à un problème et opte pour la solution miracle déterminée par son scénario. Stewart et Joines parlent ici de quatre comportements passifs confirment la méconnaissance, soit l’abstention, la suradaptation, l’agitation et le blocage ou la violence qui sont tous des façons de renforcer le scénario personnel. L’analyse transactionnelle permet alors aux thérapeutes de repérer la méconnaissance à travers le dialogue verbal et non verbal des clients, ce qui permet une intervention plus efficace.

Le chapitre 18 a pour titre Tableau des méconnaissances. Les auteurs classent les méconnaissances en fonction des zones (méconnaissance envers l’individu, la situation et les autres), des types (méconnaissance des stimuli, des problèmes et des options possibles) et des niveaux (méconnaissance de l’existence des options, la signification des options, les possibilités de changement et les capacités personnelles). Toutes ces méconnaissances sont classées dans un tableau qui permet de cerner l’information négligée et de préciser les actions à prendre pour résoudre la situation. Chaque individu aborde une situation avec des angles différents et la méconnaissance peut prendre place si une personne est mal ou non informée. Créé à la base pour une psychothérapie, le tableau des méconnaissances permet de s’attarder à la résolution de problème.

Le chapitre 19 nommé Cadre de référence et redéfinition. Stewart et Joines conçoivent que chaque individu regarde et analyse une situation avec son propre schème en fonction de son cadre de référence. Deux personnes peuvent regarder une scène et ne pas porter leur attention sur les mêmes choses. Leur subjectivité et leur interprétation teintent leurs observations et le cadre de référence fournit des lunettes à travers lesquelles l’individu voit le monde en fonction de ses états du moi, ce qui le définit. Ceci explique aussi pourquoi les états du moi sont en lien avec le cadre de référence et le scénario, car ils provoquent de la méconnaissance. Vient ensuite la notion de redéfinition qui est le résultat de la mise en place d’un comportement de méconnaissance. Lorsque la personne redéfinit, c’est qu’elle méconnait une situation et elle tente de faire face à une distorsion de la pensée ou des événements pour ainsi la faire cadrer avec son scénario.

Le chapitre 20 a pour titre La Symbiose et se définit par les auteurs comme une fusion des états du moi par deux personnes ou plus dans laquelle ces derniers n’utilisent pas tous les états du moi. Par exemple, une personne peut utiliser son Parent et Adulte et un autre son Enfant. À eux, ils couvrent les trois états du moi, ce qui crée une symbiose malsaine. Une fois utilisés, les acteurs peuvent se sentir bien dans cette relation. En général, toute symbiose malsaine est issue d’une méconnaissance. Les auteurs définissent aussi une symbiose saine et donne l’exemple d’un enfant qui grandit et dont les parents l’éduquent et lui donne ce dont il a besoin. D’un point de vue idéaliste, il pourrait être possible de dire qu’à mesure que l’enfant grandit, le processus de symbiose se rompt pour laisser place à l’indépendance. Il y a donc de nouveau méconnaissance dans laquelle l’individu n’a pas complète satisfaction de ses besoins. La symbiose compétitive est le terme utilisé pour comprendre la compétition qui peut y avoir entre deux individus qui empruntent leur état du moi Parent, et ce, en même temps. Ces concepts sont intéressants pour analyser les dynamiques interpersonnelles et pour comprendre les comportements individuels.

Le chapitre 21 se nomme Parasitage et timbres. Il est question de définir tout d’abord le terme sentiment parasite qui se rattache à une « émotion habituelle, apprise et encouragée » par un individu lors de nombreuses circonstances stressantes et utilisée comme une façon de résoudre un problème dans un scénario. Pour sa part, le parasitage est un schéma dans lequel l’individu utilise intentionnellement un sentiment parasite. Il peut même arrivé qu’un individu mette en scène un parasitage pour justifier l’émotion d’un sentiment parasite. Les sentiments parasitaires peuvent être divers en fonction de la vie d’un individu et ils peuvent être des sentiments authentiques. À l’inverse, ils ne créent pas le même effet : le sentiment authentique est une bonne façon de régler une problématique alors que le sentiment parasitaire ne vise que le contraire, c'est-à-dire de ne pas résoudre une situation.

Le chapitre 22 s’intitule Le circuit des sentiments parasites qui est présenté par Stewart et Joine comme des croyances, des pensées, des actions que les individus mettent en place lorsqu’ils sont aux prises avec leur scénario. Trois concepts sont liés à ce circuit : croyances et sentiments scénariques, manifestations de parasitage et souvenirs renforçants. Les croyances et sentiments scénariques sont des croyances des sentiments réprimés que l’individu entretient à son sujet, mais aussi à propos des autres et de sa qualité de vie. Les manifestations de parasitage sont « toutes les attitudes internes et extérieures qui sont des manifestations de croyances et sentiments scénariques ». Les souvenirs renforçants sont des pensées qui réfèrent à des situations, des émotions, des actions passées qui ajoutent de l’importance au scénario. Les croyances scénariques sont donc renforcées et cela prend la forme d’un processus cyclique. Toutefois, le circuit des sentiments parasites peut être interrompu et, ensuite corrigé.

Le chapitre 23 a pour titre Jeux et analyse des jeux. L’AT aborde ici la notion de jeu qui est une situation psychologique établie entre deux personnes de façon répétitive, ignorée par l’état du moi Adulte, qui engendre sans cesse des sentiments parasites, qui entraine des transactions non dévoilées et qui provoque des moments inattendus. Le jeu peut être représenté par un triangle avec trois acteurs : Persécuteur, Sauveteur et Victime. Le persécuteur joue le rôle de l’humiliateur, celui qui aime diminuer les autres. Le sauveur pense qu’il doit tirer les autres du jeu, qu’ils ont besoin de lui à travers une relation inégale. Pour sa part, la victime cherche un sauveur et se sent diminuée face aux autres. Ces trois positions sont en lien avec la méconnaissance, mais ils ne méconnaissent pas tous la même chose, dépendamment de leur position. Ainsi, les acteurs changent constamment de rôles. Ce diagramme a été élaboré de différentes façons par divers auteurs.

Le chapitre 24 est appelé Pourquoi jouer ? Tout d’abord, les individus jouent pour donner vie à leurs scénarios et donc à ses sentiments parasites. Le jeu permet donc de renforcer ce scénario. Le jeu rappelle aussi le concept de symbiose abordée dans une situation à travers laquelle deux individus se partagent les trois états du moi. Ainsi, le jeu se rapporte aussi directement à obtenir un besoin non satisfait par l’état du moi de l’Enfant.

Le chapitre 25 se nomme Que faire des jeux ? et aborde différents jeux les plus utilisés. Les auteurs mettent aussi en garde que lorsqu’un jeu est reconnu, une des façons de s’en sortir est de changer l’état du moi. Un individu ne peut pas contrôler lorsque les autres jouent, mais il peut contrôler ses comportements et refuser d’y participer dès le début, ce qui incitera l’autre à ne pas le provoquer, si un individu n’a pas réussi à stopper le jeu dès le début, il peut néanmoins refuser les bénéfices négatifs et prendre les bénéfices positifs. Ce chapitre met fin à la théorie de l’analyse transactionnelle.

Le chapitre 26 se nomme Contrats de changement et débute une rubrique à propos de l’utilisation globale de l’AT. La notion de contrat est détaillée dans ce chapitre, sous forme de contrat administratif et contrat clinique. Un contrat sain s’avère une entente entre le thérapeute et le client sur le consentement, les tarifs, la compétence et l’objectif légal. En fait, les deux parties s’entendent sur leur collaboration et sur les activités les liant. Cette occasion permet de clarifier les besoins et objectifs à atteindre au cours de la relation. Au-delà de l’analyse transactionnelle, le contrat est un élément essentiel pour bien démarrer la relation.

Le chapitre 27 a pour titre But du changement en AT. À travers la relation, le but visé est le changement qui peut se faire voir par l’autonomie du client. Cette autonomie se définit par une conscience claire, une spontanéité et une intimité. L’autonomie peut aussi se définir par une diminution de l’utilisation des scénarios, donc une plus grande liberté individuelle pour résoudre des problèmes.

Le chapitre 28 se nomme Thérapie AT et amène les techniques thérapeutiques de l’AT. Il est d’abord question d’autothérapie qui se détaille sur le fait que personne ne peut faire changer un individu. Il doit y avoir à la base une volonté de changer et l’AT se veut une thérapie permettant à l’individu de travailler seul dans l’atteinte d’un changement. Même si l’AT met de l’avant l’autothérapie, l’accompagnement d’un thérapeute est fortement conseillé, car l’individu peut faire une analyse erronée ou mettre de côté des éléments importants qu’il pourrait percevoir comme étant anodins. Les auteurs présentent aussi les trois grandes écoles de base de l’AT soit l’École classique, l’École de la redécision et l’École des Schiff qui ont développé des concepts divers. Malgré ces grandes écoles, l’AT est une approche qui intègre beaucoup de techniques d’approches différentes et qui permet dont une intervention variée et spécifique en fonction du client.

Le chapitre 29 s’intitule L’AT dans les organisations et l’éducation. Stewart et Joines présentent différentes façons de mettre en pratique l’AT et ce, dans des milieux d’éducation, de gestion et d’organisation. Les interventions en milieu organisationnel et en éducation ont avantage à être adaptées en fonction du contexte. Par exemple, un intervenant engagé par la gestion pourrait travailler davantage en résolution de problème plutôt que sur l’aspect psychologique. Dans ce genre d’activités, les barèmes sont différents : l’activité est peut-être imposée et donc, non volontaire, etc. Ainsi, le consentement a avantage à être fait entre l’intervenant et la gestion au lieu de le faire directement avec le client. Les états du moi peuvent s’exprimer autant chez l’individu que chez une organisation et peuvent révéler des situations inefficaces.

Le chapitre 30 a pour titre Historique de l’AT et débute en présentant Éric Berne, le père de l’analyse transactionnelle, né à Montréal en 1910. Les auteurs décrivent sa vie qui a été ponctuée du décès de son père alors qu’il avait 9 ans, de ses études en médecine et de son internat en psychiatrie, discipline dans laquelle il travailla pendant la guerre. Les auteurs du livre ne le mentionnent pas, mais il est intéressant de savoir que Éric Berne a d’abord été formé en psychiatrie aux États-Unis et a travaillé dans l’armée américaine comme psychiatre. Berne souhaitait grandement faire partie de l’Institut de psychanalyse il fut refusé.  Ses articles suivants ont fait place à l’élaboration de l’analyse transactionnelle. Son article "Transactional Analysis: A New and Effective Method of Group Therapy" (1958) marque le début de cette approche. Avec des collègues, il fonde l’Association internationale d’Analyse transactionnelle témoignant de l’engouement de plusieurs professionnels envers cette approche. En 1970, Berne décéda et plusieurs de ses collègues poursuivirent ses travaux qui approfondissaient l’approche. Berne laisse un héritage énorme et la publication de plus d’une trentaine d’écrits.

4.    Pertinence pratique


L’analyse transactionnelle peut s’avérer être un outil très pertinent en counseling de carrière. Dans un premier temps, l’AT permet de dresser un portrait du client en regard à son processus fonctionnel et structural. Ayant à l’esprit comment le client fonctionne ainsi que le contenu de ses schémas, il sera plus aisé d’amener ce dernier à réfléchir aux limites qu’il s’impose et d’en identifier la source. Dans le cadre de notre pratique, il est possible de les identifier par les messieurs, mesdames Ouimet (Oui mais). Ils portent en eux un désir de changement qu’ils voient réfréné par un comportement statique et un manque de confiance en leurs ressources. Dans le même ordre d’idée, lorsque confronté à un client qui régulièrement change d’emploi, l’analyse structurale et les transactions peuvent amener des renseignements supplémentaires parfois invisibles à la conscience du client, mais qui permettront de valider les prémisses de la problématique. De façon plus concrète, un client ayant un scénario dans l’état du moi Enfant l’amenant à exprimer de la colère lorsqu’il est en relation avec son patron aura besoin d’une aide professionnelle pour être en mesure de faire cesser ce scénario. Les états du moi s’avèrent des bons concepts de travail pour les professionnels de la relation d’aide, car ils sont l’essence même de l’identification et de la compréhension des transactions interpersonnelles. L’analyse transactionnelle est orientée davantage vers le changement plutôt que vers la prise de conscience. Non pas que la prise de conscience ne soit pas efficace, mais dans un monde vivant à une vitesse effrénée, les clients sont intéressés par des changements pratiques et rapides. Cette approche active met en place des solutions rapides et habilite le client à reconnaître ses propres comportements. Idéal en counseling de groupe, elle permet au client de reproduire la situation problématique de son enfance lorsqu’il est en interaction avec les autres. Par la suite, lorsqu’il les comprend bien, il peut mettre en place des mécanismes pour les freiner. Plusieurs activités offertes dans le livre peuvent être adaptées à la réalité du counseling de carrière, individuel ou de groupe, mais dans une perspective d’orientation. Chaque individu est porteur de scénario donc, de schéma guidant inconsciemment ses pensées, ses comportements et ses émotions pouvant l’empêcher d’évoluer au plan personnel, mais aussi au niveau professionnel. Un conseiller d’orientation ayant comme cadre de référence l’analyse transactionnelle sera en mesure de répondre au premier besoin de son client ; qui suis-je ? Ce n’est que par la connaissance de soi que l’on peut aspirer à trouver son identité professionnelle.

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