lundi 10 décembre 2012

Comprendre l'indécision vocationnelle ... selon Katherine Coté, c.o.


Comprendre l’indécision vocationnelle


 


Katherine Coté, c.o.[1]

 

 

L’analyse qualitative du verbatim de quinze entrevues enregistrées sur audio avec quinze conseillères et conseillers d’orientation de différents cégeps de la province de Québec a permis de mettre en lumière leurs perceptions entretenues à l’égard de l’indécision vocationnelle vécue par les collégiennes et collégiens dans le cadre de leur pratique professionnelle. Cette discussion vise principalement à allier les éléments théoriques énoncés précédemment à propos de l’indécision vocationnelle avec les perceptions entretenues à cet égard par les conseillères et conseillers d’orientation interviewés pour cette recherche.

 


 

À ce sujet, les conseillères et conseillers en orientation interviewés ont effectivement illustré que le manque de maturité vocationnelle est dû au jeune âge des collégiennes et collégiens en se basant sur les causes sous-jacentes suivantes : leur développement identitaire inachevé, et leur connaissance de soi et expériences de vie étant limitées. Cela corrobore tout à fait avec ce que mentionnent le CSÉ (2002), Super (cité dans Bujold et Gingras, 2000 et dans Poirier et Gagné, 1984), Holland et Holland (1977), Harren (1979), Guay, Ratelle, Senécal, Larose et Deschênes (2006), Falardeau (2007), Donson (1996, 2003), et Forner (2001, 2007).

 

En effet, les perceptions des conseillères et conseillers d’orientation concernant leurs doutes quant au niveau de maturité vocationnelle des jeunes collégiens sont fort probablement influencées par leur cadre d’analyse théorique initial issu de leur formation universitaire où les approches développementales en orientation leur étaient enseignées. Par exemple, par ses nombreuses publications, Donald E. Super, théoricien, praticien et chercheur d’une renommée internationale en psychologie développementale au niveau de l’orientation professionnelle, a su influencer grandement la profession des conseillères et conseillers d’orientation à travers le monde. Ce théoricien a notamment expliqué les notions de maturité vocationnelle, de concept de soi (image de soi), de rôles de vie, d’influences familiales et socioéconomiques, de stades développementaux incluant des tâches développementales à réaliser selon des regroupements d’âges approximatifs en lien avec son développement de carrière.

 

D’une part, la psychologie développementale comporte l’avantage principal de comprendre son client en orientation à travers ses stades développementaux franchis au cours des étapes développementales importantes de sa vie personnelle et professionnelle. D’un autre côté, il est de mise d’éviter de se limiter uniquement à l’approche développementale car les individus ne traversent pas toujours les mêmes stades en même temps. À vrai dire, il y a sans doute des variations entre les personnes car la psychologie humaine est complexe. Dans ces conditions, l’éclectisme au niveau des approches utilisées constitue en une alternative à privilégier pour ainsi bien compléter et enrichir ses interventions auprès d’une clientèle en processus d’orientation.

 


 

            Plusieurs conseillères et conseillers d’orientation ont discouru à propos de différentes réactions émotives et comportementales qu’ils perçoivent chez les jeunes indécis en processus d’orientation. Entre autres, ils mentionnent différents types d’anxiété dont l’anxiété décisionnelle qui est passagère et l’anxiété problématique qui empêche la décision de carrière parce qu’elle doit idéalement être traitée en thérapie avec un psychologue. Ainsi, le facteur de l’anxiété comme réaction émotive face à l’indécision est documenté par Falardeau et Roy (1999), Falardeau (2007), Forner (2001, 2007), Krumboltz (1992), Harren (1979), Gati, Krauss et Osipow (1996), Savikas (1995), Peterson, Sampson, Reardon et Lenz (1996), le Guide d’évaluation en orientation, OCCOQ (2010) et Matte (2010). Enfin, avec l’appui des propos des spécialistes de l’orientation interviewés pour cette présente recherche ainsi que des nombreux chercheurs corroborant le fait que l’anxiété constitue en un facteur très souvent prédominant en matière d’indécision, il appert de constater que l’anxiété paralyse la décision relative à la carrière ou bien repousse le délai décisionnel chez les clients indécis. Le rôle du conseiller d’orientation est alors d’évaluer le niveau d’anxiété du client pour voir s’il s’agit d’une anxiété décisionnelle passagère qui requiert un soutien en counseling d’orientation (ex. : exercices d’introspection, psychométrie, information scolaire et professionnelle, etc.) pour ainsi soulager graduellement l’ambiguïté reliée au choix professionnel ou bien s’il est question d’une anxiété chronique et pathologique dans plusieurs sphères de vie qui nécessiterait une référence chez un psychologue.

 

De surcroît, quelques spécialistes de l’orientation interviewés ont perçu le manque de confiance en soi comme une source plausible d’indécision qui amène diverses réactions émotives et comportementales telles que l’accumulation d’information de manière compulsive, le sentiment de confusion face à l’avenir et le maintien de distorsions cognitives (croyances irréalistes) à propos de soi et de son environnement. Conséquemment, plusieurs auteurs corroborent le fait qu’une lacune au niveau de la confiance en soi (estime personnelle), l’entretien de fausses croyances et de généralisations à propos de soi et/ou de son environnement nuisent au processus décisionnel (Holland et Holland (1977);  Harren (1979); Peterson, Sampson, Reardon et Lenz (1996); Mitchell et Krumboltz (1996); Guide d’évaluation en orientation, OCCOQ (2010), Gati, Krauss et Osipow (1996), Falardeau et Roy (1999), Falardeau (2007) et Matte (2010).

 

Encore au sujet de leurs perceptions, des conseillères et des conseillers d’orientation parlent de certains jeunes qui se décident à la dernière minute à cause de la situation d’urgence, contrairement à d’autres qui prennent le temps de bien réfléchir sans attendre au dernier moment. Pour ces personnes indécises, il s’agit donc de réactions diamétralement opposées qui les amènent à consulter en orientation. Tel que l’ont documenté Falardeau et Roy (1999), certains jeunes veulent complètement éviter le sujet pour remettre à plus tard le moment de choisir par peur de se commettre dans un choix. D’autres n’arrivent jamais à se décider car ils ne cessent d’accumuler de l’information sur plusieurs professions sans toutefois aller en profondeur (Falardeau et Roy, 1999). Celles-ci constituent alors en des réactions émotives et comportementales possibles dans une situation d’indécision qui sont très souvent reliées à un sentiment d’anxiété.

 

En effet, les conseillères et conseillers d’orientation ont reçu une solide formation en counseling pour pouvoir bien dépister les réactions émotives et comportementales de leurs clients en orientation. Ces derniers sont alors compétents pour reconnaître les réactions comportementales et émotives qui peuvent bloquer le processus du choix de carrière comme l’anxiété, la procrastination qui amène une décision dans une situation d’urgence et d’inconfort, le manque de confiance en soi et en l’avenir, etc. En démarche d’orientation, ces spécialistes de l’orientation doivent alors faire prendre conscience aux clients que certaines de leurs réactions comportementales et émotives peuvent nuire au dénouement du choix vocationnel.

 


 

 

            Quelques conseillères et conseillers d’orientation ont discuté à propos de mesures d’aide à l’orientation. Ils ont alors énuméré les mesures d’aide suivantes pour contrer l’indécision vocationnelle, entre autres, le counseling individuel, les interventions groupales, l’introspection pour approfondir la connaissance de soi, le testing psychométrique, la réflexion sur les méthodes de prise de décision à privilégier, les activités d’approche orientante, les rencontres avec des professionnels du milieu, et la documentation sur le marché du travail et les formations reliées. Effectivement, il appert de bien comprendre que les professionnels de l’orientation doivent varier leurs méthodes d’intervention pour ainsi bien répondre à différents besoins chez des clientèles variées. Par exemple, une évaluation psychométrique mesurant les intérêts et la personnalité ne serait pas appropriée pour une personne en dépression, car pendant cette maladie, les intérêts d’un individu sont atténués par l’humeur dépressive. Dans un autre cas, un test psychométrique et des exercices d’introspection s’avèreraient bénéfiques pour un jeune collégien qui manque de maturité vocationnelle et qui se connaît peu. Aussi, des ateliers d’approche orientante sont plus dédiés aux étudiants qu’aux adultes ayant plus de dix années d’expérience sur le marché du travail. En terminant, il existe moult exemples pour démontrer que les conseillères et conseillers d’orientation doivent se servir de leur jugement professionnel pour ainsi choisir la méthode d’intervention appropriée à la problématique du client (ex. : santé physique et mentale, situation d’indécision passagère ou chronique, besoins, âge, imminence d’une décision à prendre, etc.).

 

Ces spécialistes de l’orientation interviewés mentionnent également que les émotions doivent être prises en compte dans un processus décisionnel pour que la personne se sente confortable avec son choix. Comme l’ont précisé Peterson, Sampson, Reardon et Lenz (1996) : « le fait d’exposer une résolution de problème relative à la carrière en tenant compte d’une perspective du traitement cognitif de l’information implique de reconnaître l’éventail des émotions humaines qui interagissent dans la prise de décision. » (p. 429-430, traduction libre)

 

De surcroît, les perceptions des conseillères et conseillers d’orientation vont dans le même sens que les auteurs Peterson, Sampson, Reardon et Lenz (1996) lorsqu’ils stipulent que le client doit communiquer son besoin, analyser sa situation, synthétiser ses options plausibles, évaluer ses différentes avenues et mettre à exécution son plan d’action tout en ayant considéré ses facteurs de réalité (cycle des habiletés décisionnelles CASVE). Par la suite, très souvent avec l’aide du conseiller d’orientation, l’individu doit réfléchir sur l’ensemble de son processus décisionnel. A-t-il mis en œuvre des stratégies gagnantes pour y arriver ? A-t-il vérifié s’il avait le potentiel (cote R, motivation, santé, etc.) pour s’inscrire dans une telle formation ? (Sampson, Reardon et Lenz, 1996) En fait, les conseillères et conseillers d’orientation interviewés trouvent important d’amener le jeune à effectuer de la métacognition sur l’ensemble de son processus décisionnel pour que sa démarche d’orientation fasse du sens et le rende donc plus apte à prendre une décision de façon autonome et que celle-ci soit reliée avec ses propres aspirations.

 

Krumboltz (1992) mentionne que la société devrait mieux habiliter les gens aux méthodes de prise de décision. Selon Forner (2001), une absence de méthode de prise de décision peut causer de l’indécision. En effet, Peterson, Sampson, Reardon et Lenz (1996) parlent beaucoup de la connaissance de soi et de la recherche d’information scolaire et professionnelle comme étant deux étapes primordiales pour en arriver à la prise de décision. De surcroît, Gati, Krauss et Osipow (1996) renchérissent que des manques d’informations à propos de soi-même (ses compétences, valeurs, et intérêts), des professions, des domaines de formation, des méthodes de prise de décision ainsi que des façons d’obtenir des renseignements pertinents à son plan de carrière constituent en d’autres causes d’indécision professionnelle. Par leur approche basée sur l’apprentissage social, Mitchell et Krumboltz (1996) stipulent que les jeunes doivent aller découvrir sur le terrain les professions envisagées pour qu’ils puissent enfin confronter leurs perceptions et possibles préjugés avec la réalité. Ces collégiennes et collégiens sont alors encouragés à aller rencontrer des professionnels directement dans leur environnement de travail par l’entremise de rencontres d’informations ou bien de stages d’observation. Puis, les styles décisionnels rationnels, intuitifs et dépendants sont représentés dans le modèle de Harren (1979). En effet, le conseiller d’orientation doit alors être conscient du style décisionnel de son client pour l’outiller à travailler sa prise de décision en appuyant sur ses forces et en corrigeant certaines limites associées à son style décisionnel. Par exemple, le style dépendant devra se détacher graduellement de son attitude passive dans le but d’acquérir une attitude active tout en acceptant la responsabilité de ses choix sans s’en remettre aux autres. De ce fait, les conseillères et conseillers d’orientation travaillent l’ensemble de ces méthodes d’intervention reliées au travail sur l’identité et aux outils de prise de décision. De même, le Guide d’évaluation en orientation (2010) définit la pratique de l'orientation des conseillères et conseillers d’orientation en mentionnant qu’il faut :

« Évaluer le fonctionnement psychologique, les ressources personnelles et les conditions du milieu, intervenir sur l’identité ainsi que de développer et maintenir des stratégies actives d’adaptation dans le but de permettre des choix personnels et professionnels tout au long de la vie, de rétablir l’autonomie socioprofessionnelle et de réaliser des projets de carrière chez l’être humain en interaction avec son environnement. » (p. 3)

 

Quant qu’à la vulgarisation des informations du monde du travail, Savard, Michaud, Bilodeau et Arseneau (2007) démontrent que l’intervention d’un conseiller contribue de façon significative dans la prise de décision de carrière du client. « Le conseiller est en mesure de considérer le profil psychologique particulier de l’individu, sa situation unique et son interaction avec l’environnement. » (Savard, Michaud, Bilodeau et Arseneau, 2007, p. 161) De plus, suite à une étude sur des adolescents canadiens, Julien (1999) stipule que 59,7 % des jeunes ont du mal à obtenir les renseignements nécessaires à leur planification de carrière. Julien (1999) ajoute que ces adolescents se sentent dépassés par la surcharge d’informations sur le monde du travail. En effet, l’intervention d’un conseiller d’orientation s’avère très bénéfique pour contrer l’indécision et l’anxiété reliées à un choix de carrière dans cette mer d’informations sur le marché du travail. Effectivement, les discours des conseillères et conseillers d’orientation interviewés vont tout à fait dans le sens des recherches de Savard, Michaud, Bilodeau et Arseneau (2007) et de Julien (1999). En fait, ces spécialistes de l’orientation interviewés voient l’importance de bien accompagner leurs clients tout au long de leur processus décisionnel car ces derniers découvrent leur identité personnelle et professionnelle par l’entreprise du counseling d’orientation, de la vulgarisation des informations sur le marché du travail et des programmes de formation, des animations groupales et de la passation d’outils psychométriques.

 

Comme pistes d’intervention, les spécialistes de l’orientation ont entretenu des propos semblables à ceux qu’utilisaient le théoricien Super (cité dans Bujold et Gingras, 2000 et dans Poirier et Gagné, 1984), soit les étapes développementales de l’exploration, de la cristallisation, de la spécification ainsi que de la réalisation (actualisation) du choix vocationnel. En fait, ils en ont fait la mention de façon sous-entendue lorsqu’ils discutaient de l’étape où l’individu explore les diverses facettes de son identité personnelle en lien avec des milieux professionnels différents (exploration en sous-entendu). Ensuite, le jeune classifie et regroupe les différentes professions en fonction de ses champs d’intérêts qui commencent à s’éclaircir davantage (cristallisation en sous-entendu). Après, la collégienne ou le collégien prévoit divers scénarios possibles en fonction de ses préférences professionnelles dans le but de se diriger vers un secteur d’activités plus précis (spécification en sous-entendu). La dernière étape de consiste alors à planifier les démarches pour ainsi mettre en action son plan de carrière en regardant les facteurs de réalité avec son conseiller d’orientation tels que la cote R demandée, le soutien familial et financier, les choix de rechange, la distance géographique du choix d’université, etc. (réalisation en sous-entendu)

 



 

            Plusieurs conseillères et conseillers d’orientation interviewés ont expliqué que le choix de carrière se trouvait grandement influencé par le réseau social du jeune dont la famille, les proches, les amis et ainsi que les environnements scolaires, professionnels, sportifs et communautaires. Cependant, certaines influences peuvent être bénéfiques, mais d’autres peuvent nuire au processus décisionnel des collégiennes et collégiens. Cela dépend des types d’interaction sociale que les jeunes entretiennent et de la façon dont ils gèrent les commentaires reçus. Par exemple, certains étudiantes ont des parents de type contrôlant et se laissent envahir par leurs rétroactions tandis que d’autres s’affirment et agissent conformément à leurs aspirations intrinsèques. Effectivement, beaucoup d’auteurs cités dans cet essai appuient les perceptions entretenues par les spécialistes de l’orientation interviewés.

 

Tout d’abord, Harren (1979) explique l’influence de l’environnement familial et social (amis, enseignants, collègues, patrons, etc.) dans le choix de carrière par l’entremise de leur encouragement, respect, reconnaissance, soutien psychologique et financier, de la mutualité du choix qui est assumé par un couple ou une famille, etc. Bien que l’entourage immédiat soit important, Harren (1979) précise que le choix de carrière doit être vécu par la collégienne ou le collégien avec un niveau ajusté d’autonomie, de maturité interpersonnelle et de conscience de ses buts. Ensuite, Gati, Krauss et Osipow (1996) et Peterson, Sampson, Reardon et Lenz (1996) ont illustré parmi les sources reliées à l’indécision vocationnelle que la pression du milieu ajoute un stress au sein du processus décisionnel. Quant à eux, Mitchell et Krumboltz (1996) discourent à propos des facteurs environnementaux qui reposent sur des influences d’ordre social, économique, politique, culturel, etc. Ainsi, les conditions familiales, socioéconomiques et communautaires auront un effet majeur sur l’accessibilité à différents contacts professionnels. Or, dans le Guide d’évaluation en orientation (2010), la famille, les camarades, les collègues de travail et d’études, les patrons et les enseignants font partie intégrante des conditions du milieu du client à évaluer en processus d’orientation pour ainsi mettre en lumière, entre autres, les possibilités d’emploi, les valeurs, les échanges relationnels importants ainsi que les différentes influences possibles reliées au choix vocationnel. Aussi, les conditions du milieu regroupent, entre autres, le contexte socioculturel, institutionnel, organisationnel et économique de la personne. Selon le Guide d’évaluation en orientation (2010), il est également important de considérer que les contacts et réseaux sociaux font partis des ressources personnelles de l’individu pouvant l’aider dans son choix. À tous ces égards, les propos des conseillères et conseillers d’orientation interviewés vont sensiblement dans la même direction que ces écrits, sauf que les c.o. n’ont pas précisément spécifié les impacts des milieux socioéconomiques des jeunes. Ils se sont davantage penchés sur les causes individuelles reliées à l’indécision plutôt qu’aux causes socioéconomiques.

 

De surcroît, tel que l’explique Super (cité dans Bujold & Gingras, 2000; Poirier et Gagné, 1984), depuis l’enfance, les influences familiales, économiques ainsi que les différents rôles de vie joués (étudiant, employé, membre d’une équipe, parent, etc.) façonnent le concept de soi de la manière dont la personne se perçoit au plan de ses intérêts, compétences et valeurs. En fait, les propos des conseillères et conseillers d’orientation  corroborent tout à fait avec cette vision de Super lorsqu’ils mentionnent que la famille et les proches démontrent des modèles personnels et professionnels tout en ayant pour fonction d’être des reflets identitaires importants.

 

D’ailleurs, les chercheurs Guay, Senécal, Gauthier et Fernet (2003) ont stipulé que les perceptions entretenues par  une collégienne ou un collégien sur sa propre autonomie et efficacité personnelle sont influencées par ses relations parentales et amicales. De ce fait, ces personnes significatives ne doivent pas contrôler le jeune ni le surprotéger dans ses choix, mais bien l’encourager à prendre des actions qui l’inciteront à développer son autonomie et son sentiment efficacité personnelle en regard à son développement de carrière. En somme, les propos entretenus par les conseillères et conseillers d’orientation sont donc semblables car ils ont été sensibles au fait que l’entourage de la cégépienne ou du cégépien puisse influencer la façon dont est perçue l’indécision ainsi que la prise de décision vocationnelle. Cependant, ils n’ont pas été jusqu’à préciser que l’influence de l’environnement social pourrait jouer sur le sentiment d’efficacité personnelle et d’autonomie du jeune.

 


 

            En outre, les conseillères et conseillers d’orientation interviewés ont clairement rapporté comme mesures actives entreprises pour l’orientation : les stages d’observation, les rencontres d’information avec des professionnels, les conférences sur les métiers et les professions ainsi que la sensibilisation des enseignants et des jeunes à l’approche orientante. Effectivement, cela aide énormément les jeunes à clarifier leur identité personnelle et professionnelle en effectuant des liens entre la matière scolaire et le monde des professions. Ainsi, Pelletier (2004) croient ardemment aux bénéfices de l’approche orientante et Mitchell et Krumboltz (1996), théoriciens de l’apprentissage social,  appuient les visites d’entreprises, les stages et rencontres d’informations avec les travailleurs du milieu pour aider les collégiennes et collégiens à s’orienter.

 



 

            Quelques conseillères et conseillers d’orientation ont mentionné que l’entrée au cégep constituait une période de transition très importante dans la vie des collégiennes et collégiens. Ces professionnels de l’orientation ont mis en lumière les mêmes propos qu’a avancés le CSÉ (2002), c’est-à-dire que ces jeunes collégiennes et collégiens commencent leur entrée dans la vie d’adulte et doivent effectuer des choix importants pour leur avenir personnel et professionnel. Ainsi, le choix vocationnel et le départ du domicile familial sont des tournants majeurs dans la vie de ces cégépiennes et cégépiens car ils doivent apprendre à devenir autonomes et à vivre avec les conséquences de leurs choix de vie. Alors, s’ils se trompent de choix de programme d’études, cela aura plusieurs répercussions sur leur vie telles que l’allongement de la durée des études, des coûts financiers en surplus, et de la persévérance qu’ils devront maintenir plus longtemps pour enfin diplômer, etc. Falardeau et Roy (1999) stipulent également que l’entrée au collégial est une étape de vie sérieuse qui génère très fréquemment de l’anxiété. De plus, ces auteurs avancent qu’un jeune sur trois change de programme d’études postsecondaires et que cette indécision atteint parfois leur sentiment de compétence décisionnelle.

 



 

Bien que les conseillères et conseillers d’orientation interviewés aient mentionné que les jeunes devaient choisir leur carrière assez tôt dans leur développement identitaire et qu’ils ne sont pas toujours matures au niveau vocationnel, ils n’ont pas amené l’aspect de la pression sociétaire pour diplômer le plus rapidement possible comme l’ont stipulé Krumboltz (1992), le MELS (2010) et le CSÉ (2002). Cependant, la seule pression sociale qui fut discutée par les conseillères et conseillers d’orientation interviewés a été celle imposée par certains parents. Si l’échantillon des c.o. interviewés avait été plus grand et par le fait même plus représentatif, peut-être que la notion de pression de la société aurait été mentionnée.

 

En outre, Krumboltz (1992) stipule qu’une situation d’indécision professionnelle génère souvent de l’anxiété ou du doute chez les personnes étant incapables de prendre une décision dans les délais prescrits par les institutions scolaires. En effet, Krumboltz (1992) affirme que, pour une période momentanée, l’indécision peut être bénéfique et constructive pour explorer des avenues avant de prendre une décision plus définitive. Ainsi, les spécialistes de l’orientation interviewés pour cet essai ont exprimé de façon partielle que l’indécision vocationnelle pouvait être un moment d’arrêt bénéfique pour se positionner sur son choix de carrière. En fait, ces professionnels de l’orientation ont expliqué que certains jeunes avaient besoin d’aller travailler ou d’aller expérimenter d’autres choses car certains collégiens ne se sentent pas prêts à prendre une décision. Aussi, à la lecture flottante du verbatim des c.o., l’indécision vocationnelle était davantage expliquée sous un angle problématique tout en amenant des pistes de solutions, entre autres, l’introspection avec ou sans l’aide des tests psychométriques, l’acquisition d’expériences nouvelles, l’influence positive de l’environnement, les stages d’observation, les activités orientantes, etc. Une intéressante piste de réflexion serait : est-ce que l’indécision vocationnelle est une situation peu souhaitable ou bien nécessaire à l’étape de la découverte identitaire dès l’entrée au collégial des jeunes collégiennes et collégiens ? La société n’influencerait-elle pas notre perception de l’indécision ?

 

De même, plusieurs auteurs mentionnent que les personnes doivent développer une bonne capacité d’adaptation pour faire face à ce monde complexe et incertain du marché de l’emploi qui subit des changements multiples et constants (Donson, 2003; Forner 2001, 2007; Krumboltz, 1992). Sur ce point, Forner (2007) précise que « chacun doit réajuster constamment son information et donc ses projets et, pour s’adapter, ne prendre de décision que le plus tard possible. » (p. 227) À première vue, les conseillères et conseillers d’orientation ne semblent pas avoir élaboré ces éléments, mais en fait, ils les sous-entendent partiellement lorsqu’ils expliquent qu’il faut tenir compte des conditions du marché du travail pour effectuer une adéquation viable avec le profil personnel et professionnel du client. Toutefois, les spécialistes en orientation ne mentionnent pas explicitement qu’il faille prendre une décision le plus tard possible comme le stipule Forner (2007). Or, le délai décisionnel dépend de nombreux facteurs psychosociaux selon les conseillères et conseillers d’orientation interviewés tels que le soutien familial, le niveau d’estime personnelle, les conditions de santé, les obligations personnelles et familiales, etc. Par ailleurs, il serait intéressant d’interviewer des conseillères et conseillers d’orientation dans le cadre d’une autre recherche à propos de leurs représentations sociales de l’indécision. En fait, dans ce présent essai, ces derniers nous ont davantage fait état des causes individuelles et psychologiques reliées à l’indécision vocationnelle dont l’anxiété passagère ou chronique, le manque de confiance en soi, les lacunes au niveau de la maturité vocationnelle, le manque d’expériences de vie et de connaissance de soi des jeunes adultes, etc.



[1] Coté, Katherine (2012).  Les perceptions entretenues par des conseillères et des conseillers d’orientation du réseau d’enseignement collégial public, à l’égard de l’indécision vocationnelle des collégiennes et des collégiens, dans le cadre de leur pratique professionnelle. Sixième chapitre – Discussion.  Rapport d’activités dirigées présenté comme exigence partielle de la maîtrise en carriérologie. Sous la direction de Louis Cournoyer, professeur. Montréal : Université du Québec à Montréal. Document disponible en ligne : http://orientationpourtous.blogspot.ca/2012/06/essai-en-ligne-les-perceptions-de-co-du.html
 

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