jeudi 7 novembre 2013

DE LA LECTURE À LA PRATIQUE ... S'adapter aux transitions de l'existence

DE LA LECTURE À LA PRATIQUE ... 

Texte diffusé initialement sur le site OrientAction. Pour l'obtenir, cliquez sur ICI


S'adapter aux transitions de l'existence ... 


Bridges, W. (2006). Transitions de vie. Comment s’adapter aux tournants de notre existence. Traduction de M. Shalak de « Transitions – Making Sense of Life’s Changes″ (2004). InterEditions. ISBN : 2100496913 



Recension d’ouvrage réalisée par :

KATIA DRONIOU, étudiante à la maîtrise en carriérologie, UQÀM
Sous la direction de :
LOUIS COURNOYER, Ph.D., c.o.
Professeur (counseling de carrière
Université du Québec à Montréal




 Avant-propos : changement ou transition, que vivent vraiment nos clients ?

William Bridges s’est intéressé, il y a plus de 30 ans, au changement lorsqu’il a lui-même opéré une réorientation de carrière. Il s’est aperçu qu’il est fréquent d’évoquer le changement dans nos vies mais de ne pas considérer la transition qui s’opère. En effet, pour lui, les deux concepts sont reliés mais non synonymes, comme on s’accorde souvent à le penser. Le terme « changement » reflète une réalité concrète et objective vécue par un individu, par exemple un déménagement ou un nouvel emploi. La transition est le volet subjectif du changement, c’est-à-dire l’adaptation interne, psychologique, que l’individu opère face à ce changement. Selon l’auteur, il ne peut y avoir de changement réussi sans que l’individu fasse un processus de transition. Certaines difficultés de nos clients seraient liées non pas au changement vécu mais à une transition manquée. La transition passe par trois phases : le renoncement à la situation actuelle donc la fin de cette situation, puis une zone neutre marquée par l’incertitude et enfin un nouveau départ. Un autre enjeu évoqué par l’auteur est la difficulté, actuellement, de vivre et de gérer les transitions dans un monde en perpétuel changement.
Ce livre est utile pour comprendre non seulement les étapes de vie et l’impact des transitions dans les différentes sphères de vie de nos clients, mais aussi d’acquérir des techniques pour leur permettre de mieux vivre les phases de transition. Puisque le changement est inévitable, autant le vivre le mieux possible !





2.     Qui est William Bridges ?

William Bridges est un auteur américain ayant étudié en sciences humaines à l’Université Harvard, à l’Université Columbia et également à l’Université Brown. Il a été professeur de littérature américaine au Collège Mills, en Californie, jusqu’en 1974. Il a également été président de l’Association de psychologie humaniste. Après avoir décidé de ne plus enseigner, il s’est interrogé sur son avenir professionnel.  En 1979, il a publié la première édition du présent ouvrage qui a été l’élément déclencheur pour la suite de sa carrière. En effet, il souhaitait partager sa propre expérience de transition de carrière car elle lui a permis de se réinventer, ce qui l’a amené à désirer accompagner d’autres personnes dans leurs transitions.  Il est donc devenu consultant et conférencier afin d’aider les individus et les entreprises à gérer efficacement le changement. Il a créé sa compagnie, William Bridges et Associés, afin d’assurer ces services. Les séminaires qu’il offre depuis 1988 ont permis de former plus de 5000 gestionnaires, formateurs et consultants au programme de transition managériale. Auteur d’une dizaine de livres qui traitent des transitions de vie et des changements, il est devenu une référence dans le domaine pour de nombreux individus et pour des entreprises. Il a travaillé non seulement avec de grandes compagnies américaines, comme Motorola, Hewlett-Packard ou AT&T, mais également avec des compagnies internationales, notamment en Australie, en France et au Brésil.




3.     Compte-rendu commenté de l’ouvrage de William Bridges (2006)

L’ouvrage compte 171 pages, réparties en 7 chapitres. La première partie du livre, intitulée « le besoin de changer », regroupe les chapitres 1 à 4. La seconde partie, intitulée « la transition, une fin qui prépare un nouveau commencement », regroupe les chapitres 5 à 7.

Le chapitre 1, intitulé « être au cœur d’une transition », fait état de la difficulté de prendre conscience que la première phase d’une transition est une fin qui implique de faire le deuil de la situation que l’on quitte. Ce deuil est d’autant plus déroutant pour les individus qui ont fait le choix de changer une situation devenue insatisfaisante et qui demeurent cependant attachés à cette situation. Bridges explique ce paradoxe de désir de changement et de regret de ce que l’on quitte par le fait que toute transition peut être douloureuse puisqu’elle contraint à être lucide sur les bons et les moins bons aspects de l’existence. L’important est également de considérer comment l’individu fait face aux fins en l’amenant à identifier, dans ses souvenirs, les fins vécues, notamment suite à un décès. Il peut être utile que l’individu établisse une liste de ce qu’il a perdu, aussi bien des personnes que des objets, et les émotions qui sont rattachées à cette perte. Ce processus devrait permettre une prise de conscience, par l’individu, de ses réactions face à une fin, afin d’identifier les stratégies d’adaptation mises en place pour y faire face. Cette prise de conscience pouvant être difficile à faire émerger en raison de souvenirs douloureux, l’auteur préconise de demander à la personne comment elle se comporte à la fin d’une soirée, de quelle façon elle quitte les autres invités ou encore comment elle a quitté son dernier emploi et qu’elle a dit au revoir à ses collègues. Cet exercice devrait permettre d’amener l’individu à identifier ses stratégies d’adaptation face aux changements. Lorsqu’une fin s’opère, une phase de vide apparait qui doit ensuite conduire à un renouveau. Ce vide pouvant être angoissant, il arrive que les individus changent l’ordre des phases en voulant du renouveau avant que la fin ne soit réglée, ce qui rend la transition encore plus nébuleuse et inquiétante.

Le chapitre 2 s’intitule « notre vie, une succession de transitions ». L’auteur précise que la transition fait partie intégrante de la vie de chacun, elle permet à l’individu d’avancer et de mûrir. Cette évolution étant présente tout au long de la vie, l’individu, confronté à des problèmes, vit probablement une phase de transition. Chaque individu passe en général à travers trois grandes phases de transition au cours de sa vie. Tout d’abord, la fin de l’enfance, phase au cours de laquelle l’individu devient un être autonome et non plus dépendant. La façon dont l’individu vit cette première phase peut avoir une grande influence sur son comportement face aux transitions suivantes car cette expérience peut avoir été intégrée comme étant un modèle à suivre. Dans ce passage vers l’autonomie, l’individu va aussi développer sa propre identité, distincte de celle de l’enfant vis-à-vis de ses parents. Il s‘agit pour l’individu, selon le psychologue Erik Erikson, de parvenir à construire « un sentiment d’identité cohérent ». Or, la fin de l’enfance ne coïncide pas toujours avec la fin de la construction de l’identité, cette construction pouvant se poursuivre bien après et révéler ses lacunes lors des transitions suivantes. La concrétisation de l’autonomie est un tournant décisif pour la plupart des individus, à l’image d’un oiseau qui quitte le nid. L’autonomie passe par le fait de s’intégrer dans la société et de créer des relations interpersonnelles, par exemple : trouver un emploi, se marier, avoir des enfants ou entreprendre un long voyage. Vers l’âge de trente ans, l’individu vit une nouvelle phase qui l’amène à réfléchir à ses choix de vie, à en regretter certains ou encore à vivre dans l’angoisse de ne pas avoir encore trouvé sa place dans la société. Il semble que cet âge soit synonyme d’âge adulte et de prises de décisions parfois lourdes, que l’individu souhaite parfois éviter de prendre pour conserver une certaine stabilité. La trentaine peut également être révélatrice de projets dans lesquels l’individu souhaite s’engager et s’intégrer pour enfin prendre sa place. Le passage vers la quarantaine, perçue souvent comme la crise de milieu de vie, est une crise comme une autre, selon l’auteur, car chaque individu vit un certain nombre de crises et l’une d’elle n’a pas automatiquement lieu à quarante ans. Pour Bridges, il est important de comprendre que l’âge adulte comporte des phases d’évolution et de stabilité, il n’est donc pas utile de focaliser sur une crise. Il reconnait tout de même la transition qui s’opère au cours de la quarantaine, âge placé sous le signe du bilan et du renoncement à certaines illusions, mais aussi de découverte sur soi et sur ce que l’on souhaite être réellement. La dernière phase de transition est le passage vers la vieillesse, non déterminée par le départ à la retraite mais par la recherche de sens à la vie et de réflexion profonde sur soi. Pour Bridges, le fait de vieillir n’est pas un déclin mais une étape passionnante pouvant conduire certains à vivre le plus bel âge de leur vie ! Il peut être pertinent, avec des clients se trouvant dans cette phase de transition, de les inviter à dresser la liste des transitions vécues au cours de leur vie et d’identifier ce qu’ils ont ressenti lors de ces transitions. Cette liste pourrait ensuite être comparée au parcours de vie de leur mère ou de leur père, selon le sexe du client, ce qui pourrait révéler des modèles décisionnels ou comportementaux hérités des parents pouvant s’avérer non aidant face à ce que vit le client.

Dans le chapitre 3, « transitions et rapports affectifs »,  Bridges aborde l’impact des transitions personnelles sur les relations interpersonnelles.: Comment vivre une phase de transition et gérer, en même temps, les changements qui en découlent automatiquement pour l’autre ? Ces transitions, en contexte de rapports affectifs, peuvent se heurter à ce que l’auteur nomme la « résonance interpersonnelle », comparable à un effet « boule de neige ». En effet, lorsqu’une personne change, il y a de fortes chances que cela révèle ou accentue des désirs de changements chez les personnes de son entourage. Tout groupe humain, la famille notamment, évolue dans un système dont les membres sont en interrelation. Ce système est régit par des règles souvent tacites dont les membres sont peu conscients. À l’intérieur de chaque couple, ces règles tacites existent aussi, elles incitent chacun à occuper un rôle. Lorsqu’un des membres vit une transition, ces rôles vont être rediscutés pour permettre à la personne de vivre le changement et de se développer. Cette discussion, ou « renégociation », entraîne une réorganisation du système familial ou de couple, pour clore une situation et en commencer une autre. La difficulté réside particulièrement dans la négociation des pouvoirs au sein du couple car ce pouvoir devrait passer de l’un à l’autre au cours de la relation et non être le monopole de l’un. Il peut être pertinent de dresser la liste de la répartition des pouvoirs à travers les étapes vécues par le couple car, lorsque le pouvoir change de main, cela enclenche de grandes transitions dans le couple. Pour bien vivre ces transitions, chacun doit pouvoir exprimer ce qu’il ressent et le couple devrait se servir des trois phases de la transition (le deuil, la zone neutre et le nouveau départ) pour mieux comprendre la situation. Bridges termine ce chapitre par quelques conseils pouvant aider à mieux vivre les transitions au sein du couple : 1) prendre le temps de vivre la transition et de s’habituer à ses effets; 2) instituer des règles provisoires pour que le couple continue à fonctionner pendant que la transition s’opère; 3) ne pas agir trop vite pour mettre fin à l’incertitude, afin de ne pas mettre en place des solutions hâtives et inadaptées pour l’avenir; 4) s’accorder quelques récompenses, par exemple maintenir certaines habitudes, afin de conserver un peu de continuité quand tout bouge autour de soi; 5) envisager les points positifs et négatifs de la transition, car que l’on choisisse ou que l’on soit contraint au changement, les deux pôles sont présents; 6) parler de la situation à une personne de confiance; 7) envisager la transition comme un renouveau et un apprentissage sur soi.

Le chapitre 4 porte sur « les transitions dans la vie professionnelle ». L’individu, dans son évolution, va vivre des cycles successifs qui l’amèneront à vivre d’autres expériences et à réaliser ses désirs et ses projets. Certaines activités perdent ainsi de leur intérêt, ce qui amène l’individu à vivre des transitions. En contexte professionnel, certaines cultures poussent les individus vers des objectifs, parfois difficilement atteignables, car la réussite et le prestige sont fortement valorisés. Quand cette réussite n’est pas au rendez-vous, l’individu vit alors un échec et une transition difficile. Le chemin, s’il est long et ardu pour atteindre l’objectif, peut engendrer, chez l’individu, du découragement et des doutes sur ses choix, ce qui l’amène à consulter un professionnel de l’orientation. Aujourd’hui, les changements rapides dans les entreprises poussent les travailleurs à des transitions quasi-continues, nommées innovation sur laquelle toute l’économie actuelle est fondée. Quelle que soit la situation, la transition débutera inévitablement par une fin. Elle sera suivie d’une zone neutre, au cours de laquelle un changement s’opère, mais l’incertitude qui y est associée pousse chacun à en sortir, souvent trop vite, alors que cette transformation est source d’apprentissage pour l’avenir. Les transitions professionnelles peuvent s’avérer plus difficiles, en fonction de l’importance de ce qui a déclenché le changement et si une transition dans la vie personnelle survient en même temps. Dans ces transitions, ce ne sont pas tant les changements qui sont difficiles que le processus de transition consistant à renoncer à ce que l’on était, pour définir ce que l’on veut être. L’individu va donc opposer une plus grande résistance à la transition qu’au changement. Pour aider l’individu à mieux vivre les transitions, il peut être intéressant de l’amener à se poser deux questions : 1) « à quoi dois-je renoncer ? », ce qui permet de différencier changement et transition puisque toute transition implique de faire le deuil d’une situation. Chaque individu est plutôt tenté d’ajouter que de retirer un élément à sa vie, mais toute transition n’est possible que par un renoncement préalable; 2) « qu’est ce qui m’attends en coulisses ?», ce qui amène la personne à être à l’écoute de ses rêves et questionnements pour prendre conscience de ce que la vie peut lui apporter. Ces deux questions peuvent se poser en alternance, dans n’importe quel ordre.

Ensuite, Bridges examine les transitions professionnelles selon quatre étapes. Tout d’abord, l’apprentissage est une étape ayant lieu dans la vingtaine et qui conduit l’individu vers l’autonomie. Ceci s’opère à travers des changements tels que l’emménagement dans son premier appartement, le premier emploi significatif ou encore l’indépendance financière. Cette autonomie ne s’acquiert pas seulement à travers ces événements mais doivent surtout s’accompagner d’un changement psychologique de l’individu. Cette étape comprend plusieurs transitions importantes qui marquent la fin de l’enfance et le renoncement à cette époque. La deuxième étape, celle de la création d’un foyer, s’effectue en s’installant en couple, en ayant éventuellement des enfants et en établissant sa carrière. Deux grands types de transition professionnelle vont avoir lieu au cours de cette étape : les transitions liées aux changements dans l’entreprise et celles liées à l’individu, notamment les promotions et les mutations. La troisième étape, nommée « la fin du chef de famille », est souvent liée à « la crise du milieu de vie ». L’individu enclenche parfois des changements drastiques pour ne pas vivre la transition et accepter le virage qui s’opère dans sa vie. Enfin, « le dernier chapitre », ne doit pas être synonyme de retraite selon Bridges. Il s’agit plutôt, pour l’individu, de transmettre aux jeunes ce qu’il sait des transitions pour en avoir vécu et en avoir compris le sens profond. Pour conclure ce chapitre, Bridges invite les lecteurs à s’interroger sur les transitions personnelles et professionnelles, vécues ou en cours, grâce à de petits exercices de réflexion.

La seconde partie du livre, intitulée « la transition, une fin qui prépare un nouveau commencement », Bridges consacre un chapitre  à chaque phase inhérente à toute transition : la fin, la zone neutre et le nouveau départ.

Dans le chapitre 5, intitulé « au début, il y a les fins », Bridges revient, comme dans le chapitre 1, sur la difficulté pour les individus d’être confrontés à la fin car elle est vue comme une conclusion définitive, alors qu’en fait elle ouvre le chemin vers autre chose. La fin peut se décomposer en cinq étapes. Le désengagement est l’élément déclencheur de la fin, ce qui va forcer l’individu à changer ses comportements. Lorsque ce processus est enclenché, le changement est inéluctable car les repères habituels sont ébranlés, voire même ont disparu. Ensuite, le démantèlement est le processus qui met fin à ce que la personne était, tant au point de vue de son identité que de ses habitudes et comportements. La troisième étape, la désidentification, est le fait de réaliser que l’on a perdu son identité ou le rôle attribué dans l’ancienne situation. La personne ne sait plus qui elle est vraiment. C’est ce qui se passe à l’intérieur de la personne quand le désengagement se produit à l’extérieur. La désidentification est une étape particulièrement importante à considérer et à analyser avec les personnes qui se définissent fortement par leur rôle. Elle est un passage obligé dans toute transition. Ensuite vient le désenchantement, lorsque la personne réalise que ce qui était n’est plus, ce qui engendre un sentiment de profonde déception et de perte alors que de nombreuses cultures préconisent une évolution basée sur l’accumulation. Le désenchantement est un signe précurseur de transition car l’individu est alors prêt à voir les choses autrement. Il faut différencier le désenchantement, qui est d’admettre que notre perception des choses a déjà fonctionné mais n’est plus adaptée, de la désillusion qui confine l’individu dans les regrets et le refus de renoncer à sa vision des choses, ce qui le pousse à reproduire les mêmes erreurs. La dernière étape, la désorientation, est la perte des repères puisque tout ce qui était familier a disparu. Cette étape est particulièrement inconfortable car l’individu navigue à l’aveuglette et ressent un grand vide susceptible de raviver les peurs d’abandon et de mort. Bridges précise ensuite la différence entre un changement, qui a un but, et la transition qui est basée sur le renoncement. Ce renoncement est forcément  à l’intérieur de la personne même s’il se manifeste par le délaissement d’un élément extérieur (conjoint, emploi…). D’ailleurs, dans les cinq étapes d’une fin, seul le désengagement est lié à ce qui est extérieur à l’individu. Le changement et la transition sont étroitement liés car l’un entraîne l’autre, tour à tour. Toute fin comporte certaines, ou toutes les étapes identifiées plus haut, et ces étapes peuvent se produire dans un ordre différent pour chaque individu. Le point commun est que la fin, pour chacun, est une mort.

Dans le chapitre 6, « au milieu la zone neutre, un temps essentiel de réorientation », il est question de la zone neutre, qui se définit par un temps de vide et de questionnements, que chacun tente de combler rapidement pour remédier à l’inconfort qui découle du vide. Il est fréquent que la personne, dans cette étape, recherche l’isolement pour réfléchir. Même si cette coupure du monde semble ne pas produire de résultats, elle est pourtant indispensable pour extraire l’individu de ses habitudes qui l’ancrent dans un fonctionnement révolu. Ceci devrait lui permettre d’accéder à une nouvelle conscience de qui il est et de ce qu’il veut. Cette zone neutre inconfortable devrait pourtant être vécue complètement selon Bridges. Pour cela, il est nécessaire d’admettre qu’elle est utile, qu’elle requiert un retrait physique et mental des habitudes et qu’elle devrait amener l’individu à analyser ce qu’il vit émotionnellement et cognitivement. Il peut être pertinent, pour l’individu, d’écrire son autobiographie pour mieux comprendre le présent, en référence au passé et ainsi se projeter dans l’avenir en déterminant ce qu’il désire devenir. La zone neutre, souvent négligée par souci d’en sortir vite et de redevenir efficace, permet pourtant de se réorienter intérieurement. Elle est la phase où l’essentiel de la transformation, vécue dans toute transition, s’effectue.

Le chapitre 7, « et vous vous retrouvez en train d’accomplir un nouveau départ », aborde ce nouveau départ qui cloture toute transition. Comment savoir que ce chemin que l’individu s’apprête à prendre est vraiment un nouveau départ ? Selon Bridges, lorsque l’individu se sent prêt à accepter ce nouveau départ, une occasion va se produire qu’il va saisir. Ce sont des signes intérieurs que l’individu doit écouter pour savoir s’il est réellement prêt. Ces signes peuvent se manifester sous forme d’idées, d’images ou encore d’impressions qui sont reliées à des désirs profonds. L’individu peut confirmer qu’il a bien vécu une transition, en fonction des réactions de son entourage lui reflétant qu’un changement s’est vraiment produit chez lui, et en fonction de sa propre analyse de la situation et des phases qu’il a traversées. Il est également important que l’individu passe à l’action car il ne peut rester sans cesse en phase neutre de réflexion et de préparation. Il peut également imaginer ce que ce nouveau départ va lui apporter et comment il va se sentir lorsqu’il aura réussi son projet. Ces phases de transition, expliquées dans le livre, se produisent fréquemment à l’âge adulte et entraînent des changements importants chez l’individu, encore faut-il qu’il sache les reconnaître.

       Pertinence pratique

Ce livre de William Bridges permet de différencier le changement de la transition. Pour tout professionnel de l’orientation et du développement de carrière, la compréhension de cette différence est essentielle puisque le changement est la partie visible de ce que le client expose, alors que la transition est le processus interne de gestion de ce changement. La transition requiert plus particulièrement l’accompagnement d’un professionnel, pour amener le client à prendre conscience de ce qu’il vit et l’aider à franchir les étapes importantes pour une transition réussie. En raison des conditions actuelles du marché du travail nécessitant une adaptation constante des travailleurs, non seulement dans leur milieu professionnel mais aussi dans leur vie personnelle, le besoin d’intervention des professionnels de l’orientation ne cesse de croître pour accompagner les clients dans la gestion du changement. 
Les outils d’intervention présentés dans cet ouvrage constituent des éléments pouvant être utilisés et adaptés à des clients de différents âges présentant des problématiques en lien avec le changement. Aux chapitres 4 et 6 notamment, l’auteur propose des exercices en lien avec les transitions professionnelles mais également personnelles. Ces exercices peuvent servir d’amorce dans les différentes phases d’un processus de counseling.
Par ailleurs, cet ouvrage apporte un nouvel éclairage pour permettre d’aider, aussi bien les clients ayant fait le choix de changer que ceux qui y sont contraints, à comprendre les émotions ressenties. La peur face au changement, et la résistance pouvant en découler, sont à envisager non pas comme des problèmes, mais comme des phases à traverser par le client. Pour le conseiller, il est donc utile d’aborder les trois phases de la transition avec le client, notamment  pour celui qui aurait fait le choix du changement mais qui serait dans l’incompréhension face à la tristesse éprouvée alors que la situation lui semblait positive au départ. En effet, le regret du passé  et l’insécurité face au futur sont des éléments présents dans les changements vécus par les clients. Le processus de deuil de la situation passée est donc un élément important de cette compréhension afin d’amener le client à retrouver un équilibre autant émotif que cognitif dans sa vie.


Dans sa démarche d’accompagnement, le conseiller aura tout intérêt à faire appel aux ressources déjà présentes chez le client, en s’appuyant sur les expériences passées positives et les mécanismes mis en place pour faire face aux précédents changements.  

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