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De la lecture à la pratique ...
Compte-rendu de l'ouvrage
Compte-rendu de l'ouvrage
Doutrelugne, Y.,
Cottencin, O. et Betbèze, J. (2013). Thérapie brèves : principes et
outils pratiques (3e
éd.). France, Paris: Elsevier Masson.ISBN : 9782294097737
Produit par :
MARJOLAINE MERCIER
Finissante à la maîtrise en carriérologie, UQÀM
Sous la direction :
Louis Cournoyer, professeur
Université du Québec à Montréal
N.B. Le texte qui suit peut être téléchargé à partir du site Orientaction à l'adresse URL suivante : CLIQUEZ ICI !
1.
Soigner la souffrance de façon rapide
et efficace
L’ouvrage Thérapies
brèves : principes et outils pratiques s’adresse à un large éventail
de professionnels de la relation d’aide ou des services de santé et services
sociaux tels que les psychologues, psychoéducateurs, infirmiers,
psychiatres, travailleurs sociaux, médecins ainsi qu’aux conseillers
d’orientation. Abordant la vision systémique, soit la globalité des
interactions composant les différents systèmes d’une personne, le mouvement des
théories brèves s’intéresse aux interactions dysfonctionnelles récurrentes et est
axé sur le présent et le futur possible. Il octroie aux intervenants une vision
de la problématique permettant de promouvoir leur créativité. Cette approche
efficace motive et encourage le client à passer à l’action et à faire des
changements réels pour une résolution rapide et permanente de leurs souffrances.
La thérapie narrative fait son entrée dans la nouvelle édition. Intéressant, ce modèle permet de construire
l’identité, redonne le pouvoir au client et crée un projet de vie en lien avec
les valeurs de la personne.
2.
Présentation des auteurs[1]
Pour la
première (2005) et deuxième (2008) édition de ce livre, les docteurs Yves
Doutrelugne et Olivier Cottencin sont les co-auteurs de Thérapie brèves : principes et outils pratiques. En 2009, ces
deux auteurs ont également publié Thérapies
brèves : situations cliniques. Depuis 1988, Dr. Doutrelugne est
praticien, thérapeute et formateur. Médecin, il est reconnu pour son humour et
son côté pragmatique. Il est chargé de conférences à l’Université Libre de
Bruxelles (ULB) et à l’Université de Lille II. Il est formateur en thérapies
brèves, en hypnose médicale ainsi qu’en compétences relationnelles. Il propose
également ces formations dans quelques entreprises, telle que la Solvay
Business School (SBS). Finalement, il est co-fondateur de plusieurs
associations dont l’Espace du Possible, l’Institut Milton H. Erickson de
Belgique et du nord de la France, de la Confédération Francophone d’Hypnose et
de Thérapie Brève. Pour sa part, Olivier Cottencin est professeur de
psychiatrie et d’addictologie à l’Université de Lille Nord de France. Pour la
troisième édition (2013) du livre présenté, Julien Betbèze s’est joint au duo
en tant que collaborateur. Psychiatre et pédopsychiatre, il est chef du service
d’Accueil familial adulte de Loire-Atlantique, thérapeute familial à l’unité
d’addiction du CHU de Nantes et chargé de cours universitaire. Ces trois
auteurs offrent de la formation aux professionnels de la santé et de la santé
mentale ou aux praticiens de la relation d’aide qui souhaitent connaître et
développer les principes et outils reliés aux modèles des thérapies brèves. Grâce
à leurs expériences de praticien et de pédagogue, ils ont su, dans leur
ouvrage, présenter les concepts théoriques de façon à faciliter l’apprentissage
et à partager leurs propres outils dans un format flexible en laissant place à la
créativité de l’intervenant qui se les appropriera.
3.
Compte rendu commenté de l’ouvrage
Huit chapitres composent ce livre de 236 pages. Les débuts et le
développement des thérapies brèves, desquelles émergent de l’approche
systémique, ainsi que certaines méthodes qui s’y rattachent, sont abordés dans
le premier chapitre. Le chapitre deux met en relief un modèle schématisé des
concepts des thérapies brèves; la thérapie systémique brève (TSB), la thérapie
orientée vers les solutions (TOS) et les mouvements alternatifs en thérapie et
hypnose (MATH). Les chapitres trois et quatre permettent aux lecteurs de se familiariser
avec les principes, outils, tactiques et stratégies des thérapies brèves. Les
auteurs ont su concrétiser les explications et apprentissages par plusieurs exemples
et cas clinique. Les chapitres cinq et six se penchent spécifiquement sur la
thérapie orientée vers les solutions et la thérapie narrative. Les chapitres
sept et huit exposent deux entretiens mettant en lumière l’intervention
paradoxale progressive, principe central des thérapies brèves.
Dès le premier chapitre, Historique
et concepts, le lecteur prend connaissance que les thérapies brèves sont
encore aujourd’hui en évolution et qu’elles sont nées sous l’influence de
l’approche systémique véhiculée par Gregory Bateson de l’école de Palo Alto. Ayant
comme centration la communication et la relation des individus avec son
entourage, Bateson s’intéresse aux travaux sur l’hypnose de Milton Hyland
Erickson. Ce dernier, ayant un style créatif et nouveau, apporte les premiers
principes aux thérapies brèves : la confusion, les paradoxes, les doubles
liens et le changement.
Quelques groupes issus de l’école de Palo Alto se forment et
contribuent au déploiement des thérapies brèves :
- Le Brief Therapy Center
(BTC), en 1967. Les chercheurs de ce groupe (dont Paul Watzlawick,
principalement cité dans ce livre) mettent sur pied une méthode nommée thérapie
systémique brève (TSB) qui a ses propres outils et grilles d’intervention.
-
Le Centre de thérapie familiale brève de Milwaukee d’où Steve de
Shazer et Bill O’Hanlon élaborent la thérapie orientée vers les solutions
(TOS).
- Le Mental Research Institute (MRI). Pendant deux ans, le MRI a été dirigé par
Nicholas Cummings, psychologue américain qui a propulsé la thérapie brève. Aussi,
du MRI, Francine Shapiro, vers la fin des années 80, expose la méthode appelée
Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR). Cette méthode propose des
séries de mouvements des yeux visant une désensibilisation traumatique puis une
restructuration cognitive. Inspirés de cette méthode et de l’hypnose, les 14
protocoles des MATH (Mouvements Alternatifs en Thérapie et Hypnose) ont été élaborés par Jean-François Terakowski.
Enfin, de cet écrit traitant
des thérapies brèves, un dernier modèle est traité, soit les thérapies
narratives.
Le chapitre deux intitulé Modèle
de thérapie stratégique combinant TSB, TOS et MATH (EMDR) décrit brièvement,
à partir d’une figure, les principaux concepts des théories de différents
groupes de l’école de Palo Alto. Tel qu’indiqué dans le livre, il est possible
de consulter ce schéma sur le site www.espace-du-possible.org sous l’onglet Nos publications. Ce schéma peut servir
d’aide-mémoire au praticien qui souhaite appliquer les concepts, étapes et
outils reliés aux thérapies brèves.
Principes des thérapies
brèves est
le titre du chapitre trois. Dans le cadre de cette recension, plusieurs
principes ont été soulevés et notés prioritaires dans la compréhension et
l’application des thérapies brèves. Les voici :
La systémique. Chaque
client fait partie d’un système et intervient dans celui-ci, c’est le principe
de la circularité d’une relation.
Alors, « quand l’autre, étant ce qu’il est, a envers moi un comportement
difficile à vivre pour moi, ma réponse permet-elle que ce comportement s’arrête
? » (p.27)[2] Si
la réponse à cette question est négative, il est possible d’affirmer que mon problème
est la tentative de solution. « Quand mon problème se répète, c’est donc
que le type de solutions que j’utilise est répétitivement inefficace. »
(p.28) Cette façon d’aborder les difficultés du client souligne la pertinence
d’observer et d’amener le client à explorer la façon dont il interagie et
communique.
La brièveté. Le rôle du
thérapeute dans la thérapie brève vise à ce qu’il devienne le plus rapidement
inutile, toutefois la complexité du cas demeure la variable la plus importante
dans la durée du traitement. Plusieurs raisons viennent appuyer cet intérêt :
1- d’un côté éthique, la personne qui souffre souhaite voir partir cette
souffrance le plus rapidement possible 2- d’un côté systémique, cette personne
souffrante est en relation avec d’autres, c’est alors tout son système qui
souffre « que nous allions bien ou mal, c’est tout le monde qui en
profite ». (p.25) 3- d’un côté économique, les longues thérapies sont coûteuses
et peu accessibles pour certains.
Le problème. Un
thérapeute adoptant l’approche des thérapies brèves soigne le problème de celui
qui souffre et ne cherche pas forcément à ce que le client en comprenne le sens
ou trouve le pourquoi. À l’inverse de l’image de l’iceberg, le problème d’une
personne ne cache pas autre chose et il devient accessoire de rechercher les
causes de ce problème : une fois celles-ci trouvées, le patient ne souffre
pas moins et le problème existe toujours.
Le changement. Pour
qu’un problème cesse, le patient doit décider de faire des changements. Le pouvoir
de décision face au changement est essentiel et une fois que le choix de
changer est fait, le thérapeute fait face à un client.
Le touriste, le plaignant et le client. Dès la première rencontre, il est nécessaire d’évaluer la
vision de la personne qui consulte face à son problème. Le touriste dira qu’il n’en a pas, le plaignant aimera qu’on l’écoute et donnera la responsabilité de son
problème à l’extérieur de lui et le client
va s’approprier son problème et mettre en œuvre les actions nécessaires pour
qu’il y ait changement. Identifier la position de la personne qui consulte
détermine la direction de l’intervention. Le rôle du thérapeute sera d’amener
un touriste à devenir plaignant et enfin client. Travailler auprès d’un client
permet de rentabiliser les efforts de l’intervenant.
La définition. Les
auteurs de ce livre adhèrent à la définition apportée par Nicholas
Cummings : « Le patient a droit au soulagement le plus rapide, le
plus complet et le plus durable possible de sa souffrance, et ce, de la façon
la moins envahissante qui soit. Je ne lui demanderai rien d’illégal, rien
d’immoral, rien d’impossible. En contrepartie, il fera tout pour me rendre
inutile aussi vite que possible. » (p. 24)
La réalité et le recadrage. La vision qu’apporte l’école
de Palo Alto face à la réalité permet de comprendre le principe de cadrage et
recadrage des thérapies brèves. La réalité est de deux ordres : ce que les
sens nous donnent comme informations (les faits) et le sens que nous y donnons
(le cadrage). Le recadrage permet de voir les choses différemment (donner un
nouveau sens) dans un but de diminuer la souffrance. Le recadrage permet de
modifier le cognitif, ainsi il y a incidence sur les trois autres aspects de la
personne : le comportemental, l’affectif et le somatique. Il devient donc
essentiel de comprendre la façon de voir du client car chacun est unique et a
des perceptions différentes des événements de sa vie. De plus, les thérapies
brèves se veulent non-normatives. Pas de classification, ni de trouble ou de
catégorie. Le thérapeute n’émet pas de diagnostic, il travaille avec la réalité
du patient tel qu’il le lui a décrit : « le patient dit avoir des
problèmes dans sa consommation d’alcool » et non pas qu’il est alcoolique
(p. 43).
Le chapitre quatre, le plus volumineux de l’ouvrage, a pour titre Outils de la thérapie brève. D’entrée de
jeu, il est expliqué que dès le premier entretien, le travail débute. Plusieurs
approches prônent que lors des premières rencontres la tâche principale est
l’établissement de la relation de confiance entre l’aidant et l’aidé. Les
techniques ou habiletés avancées sont souvent utilisées lors des séances
subséquentes. La brièveté se distinguent : la première séance doit être
thérapeutique (utilisation des techniques et outils), innovante, bienveillante
et encourageante. De plus, tel que mentionné au chapitre trois, il est de mise
d’établir qui est le patient devant nous : un touriste, un plaignant ou
un client.
Dans le cas d’un touriste
ou plaignant, la philosophie
d’intervention est d’amener le patient à devenir client. L’auteur met en garde sur cette tendance de certains
thérapeutes à travailler à la place du patient, voire, le sauver, lorsque
celui-ci n’est pas un réel client.
Beaucoup d’énergie de la part de ce thérapeute pour souvent bien peu de
résultats. Une phrase écrite à différents endroits dans l’ouvrage fait
référence à ce constat : « Quand je le fais à sa place, je ne suis
pas à la mienne et je l’empêche de prendre la sienne. » (p.52 et 61)
Souvent, le touriste se
présente en thérapie parce que quelqu’un de son entourage se plaint (souffre)
du comportement de celui-ci. Par exemple : « Mon enfant s’est inscrit
à l’école de théâtre alors que je souhaite tellement plus pour lui ! » Accueillir
la vision du patient (dans ce cas-ci l’enfant de ce parent), soit celle qu’il
n’a pas de problème, permet d’avoir une communication positive et bienveillante
entre l’aidant et l’aidé. « Comment puis-je vous aider pour que le
Référant soit satisfait? » (p. 58) Aussi, une question telle que :
« Si par magie, grâce à une baguette magique à trois coups, tu pouvais
changer trois choses dans ta vie, que changerais-tu ? » (p. 59) permet que
les désirs du client soient transformés en objectifs de travail. Du côté du client
plaignant par exemple « mon
patron m’en demande toujours plus au travail, il n’est jamais content de ce que
je fais, c’est à cause de lui si j’entre toujours en retard au travail, il me
démotive » l’auteur propose plusieurs outils pour amener le plaignant à devenir client entre autres des métaphores et l’intervention paradoxale.
L’intervention paradoxale est le principal aspect distinctif de l’école
de Palo Alto. Un paradoxe est le contraire à la logique habituelle. Lorsqu’une
solution qui apparait logique ne fonctionne pas (paradoxe préalable),
l’intervention paradoxale, soit l’intervention contraire à toute attente est expérimentée.
« Un problème chronique est un problème qui est géré de façon erronée
répétitivement : le paradoxe préalable est une erreur logique.
L’intervention paradoxale (n’) est (que) la correction d’une erreur
logique » (p.95). En raison de sa nature provocatrice et surprenante,
trois ingrédients sont nécessaires pour réaliser une intervention
paradoxale efficace: 1- repérer le paradoxe préalable 2- user de bienveillance
3- graduer l’intensité de l’intervention.
La définition du problème est l’élément central dans la thérapie
systémique brève (TSB) : « si le problème est bien défini, la
solution va de soi » (p. 67) Pour bien définir le problème, il faut en
premier lieu bien comprendre la réalité du client et le sens que celle-ci a
pour lui. Afin de bien comprendre la réalité du client, il faut l’amener à bien
définir certains mots-valises, comme les
auteurs les appellent, afin d’être en mesure de bien cibler le
problème : « C’est l’enfer à mon travail, je veux quitter. »
L’enfer est décrit de quelle façon chez cette personne ? Comment se sent-il à
son travail ? Quel comportement adopte le client ? Etc. Utiliser le
questionnement ouvert tout en prenant la position basse, soit celle de ne
prendre rien pour acquis et de positionner le client dans le rôle de l’expert
(il en connait beaucoup plus sur sa problématique que le thérapeute) permettra
de bien définir le problème. Bref, il s’agit d’explorer ce problème sous tous
les angles : cognitif, affectif, somatique et comportemental. Tel que vu
au chapitre trois, l’idée des thérapies brèves de Palo Alto est que le problème
décrit par le client est souvent la tentative de solution. L’outil proposé pour
cibler le problème est la question suivante : « Si cela était résolu,
votre problème serait-il entièrement réglé ? » (p.70) et de là, il est possible de faire ressortir
le vrai problème. Pour aider à bien définir le problème les auteurs suggèrent
une grille d’intervention personnelle qui comporte certains points
centraux : les faits, le sens donné aux faits, la circularité de la
relation. Trois questions font également partie du tableau : « En
quoi est-ce un problème? », « Pourquoi consulter
maintenant? », « Y’a-t-il des exceptions et/ou des
aggravations? » (p.142 et 143)
Dans un deuxième temps, il importe de définir l’objectif.
L’objectif, soit l’état désiré, est représenté comme étant la solution. L’avantage
non négligeable à définir l’objectif de façon concrète et précise est de
pouvoir terminer la thérapie dès que celui-ci a été atteint. Pour arriver à
définir cet objectif, l’auteur suggère 3 questions : « Que
désirez-vous? », « Quand nous terminerons ce travail, qu’est-ce qui
sera différent ? » et « À quoi verrez-vous que nous pourrons mettre
fin à cette thérapie ? » (p.70). Parce qu’un des critères d’un objectif
est qu’il vise à être réalisable, les thérapies brèves adoptent 2
visions : le changement minimum et l’effet boule de neige. La première
évoque que les apprentissages se font pas à pas, donc les tâches exigées seront
minimes et ainsi plus facilement réalisables. La deuxième est qu’il y a un effet
d’entrainement : le premier changement est initié par l’intervenant et est
le début d’un enchainement de changements qui ne nécessitent plus la poussée du
thérapeute. La grille d’intervention personnelle, évoquée plus haut, contient
également les notions importantes reliées à l’objectif : les choix pour y
parvenir, les coûts et bénéfices de chacun d’eux, les tâches concrètes
proscrites, le moteur du patient (ce qui sera utilisé pour changer le
comportement).
Deux jeux de rôles centraux sont décrits afin de travailler deux
concepts importants. Le premier est nommé Le
jeu du bras de fer et illustre le concept de la circularité de la relation décrit
au chapitre trois. Donc, que la personne est active dans la relation et qu’elle
a un pouvoir d’action. Le deuxième jeu de rôle, nommé Le jeu de l’écharpe à franges, démontre qu’il y a une panoplie de
réponses, de choix possibles donc de solutions à la suite d’une interaction ou d’un
comportement dans une relation. Un client qui prend conscience de son pouvoir
d’action sur la direction d’une situation ou d’une relation et qui observe les
différentes options pour modifier celle-ci s’engage dans un processus actif et
motivant.
Pour intégrer un apprentissage, il faut pratiquer, passer à
l’action concrète. La philosophie des thérapies brèves permettent quatre axes
pour favoriser le passage à l’action : 1- La relation innovante. Dès la
première rencontre la surprise et la créativité est à l’œuvre et a pour
conséquence d’augmenter la motivation de la personne. 2- Les jeux de rôles.
Ceux-ci permettent déjà une pratique concrète dans la thérapie. 3- Les tâches.
À chaque séance une tâche est demandée pour la prochaine rencontre. 4-
L’utilisation de l’hypnose. Car le client se plonge dans des expériences de
façon émotionnelle, il a une implication active.
Face à des propos comme : « je suis stressée d’aller
passer l’entrevue pour le poste que je souhaite. » Il peut être facile de
juger ou d’intervenir ainsi : « ben non, ça va bien aller! ». Troquer
le « pourquoi » par « vous avez certainement de bonnes raisons
d’agir ainsi » place le thérapeute dans une position où il reconnaît, accepte
les propos du client et pousse ce dernier à expliquer sa pensée, ses émotions,
ses comportements. C’est la position de l’anthropologue.
Un autre outil utilisé en thérapie brève qui favorise l’atteinte de l’objectif
tout en acceptant et reconnaissant l’univers du patient est l’utilisation : tout ce qui fait
partie de l’univers du patient peut être utilisé que ce soit un événement, un
conjoint, un trait spécifique, la religion, les compétences d’une personne…
Chaque personne a son « mode d’emploi » ou « un moteur »
(p. 87) qui une fois actionné, l’amènera à passer à l’action et à faire des
apprentissages. L’intervenant, s’il reconnaît et accepte ces moteurs, peut les
utiliser pour que le patient parvienne à son objectif.
Il arrive de rencontrer des patients qui se mettent dans une
position inconfortable peu importe le choix qu’ils prennent. Dans le même sens,
dans une relation, la communication peut également mener à ce que les options
offertes à l’autre soient « perdantes » peu importe le choix qu’il
fait. Cette notion est appelée double
lien ou double nœud. Pour
illustrer cette situation, les auteurs donnent concrètement des exemples:
« Un patient
dépressif est professeur d’économie dans une université. Il est terriblement
déçu de ne pas être le numéro un en économie dans son pays. Mais s’il était
numéro un, il serait sujet à la critique, ce qu’il ne supporterait pas non
plus. » (p.108)
« Mon chéri, il y a
trois choses que j’aimerais vraiment que tu changes dans ta façon de
faire : ça, ça et ça. Le mari effectue ensuite ces changements dans ses
comportements et sa femme lui dit : oui mais c’est trop tard ! Qu’il
fasse ou ne le fasse pas, ça ne convient pas à son épouse. Comment peut-il
faire pour que ça lui plaise ? » (p. 107)
Le rôle du thérapeute est de deux ordres : exposer la
situation qui est dérangeante, qui fait vivre de l’impuissance et habiliter le
patient à créer des doubles liens où les choix sont positifs peu importe lequel
il choisit.
Une grande section du chapitre quatre est réservée à certaines
tactiques et stratégies pour résoudre certaines situations souvent rencontrées
en thérapie. En voici quelques-unes :
- Lorsque la tentative de
solution est identifiée rapidement, il peut être opportun de mettre une condition préalable pour l’entrée en
thérapie.
-
Pour éviter les attaques personnelles ou faire face aux critiques
(autant pour l’aidé que pour l’aidant), il est proposé de prendre la position basse.
-
Lorsque le thérapeute s’est trompé, a fait une erreur, dans le but
de garder la relation avec le client tout en redevenant efficace, faire un U-turn est adapté.
-
Pour cesser un rituel ou pattern nuisible, il est
demandé au client d’effectuer un petit changement dans celui-ci.
-
Afin que le client fasse l’apprentissage de la rechute ou de la
réussite, la tactique du Petit Poucet
(faire des allers-retours entre la situation initiale et l’actuelle) est prescrite.
-
Dans l’éventualité où une tâche bénéfique mais difficile à
accomplir serait indiquée, un contrat en
blanc pourrait être signé.
-
Quand il y a des résistances, le paratonnerre est une technique utile.
- Pour qu’il y ait transfert
de compétences d’un domaine à un autre, la technique clenched fist ou « poing
serré » dans laquelle la visualisation est utilisée, est nommée.
Le chapitre quatre termine avec un dernier outil utilisé en
thérapie brève : l’hypnothérapie. Jusqu’à récemment, l’hypnothérapie peut
nous faire penser à une technique qu’utilisaient les charlatans. De nos jours,
grâce à la vision d’Erickson et ses travaux sur la communication, l’hypnose et
ses outils peuvent être intégrés dans une thérapie brève.
Le chapitre cinq aborde la Thérapie
orientée vers les solutions. Steve de Shazer et Insoo Kim Berg, et dans un
2e temps Bill O’Hanlon, ont développé les bases de ce modèle. La TOS
a un langage bien à elle. Par cette façon d’aborder les choses, entre autre de
parler du problème au passé, le client va reprendre le pouvoir sur sa vie.
Ainsi, on perçoit l’influence hypnotique d’Erickson : le patient se
projette dans un futur où le problème n’existe pas. L’utilisation du même
langage que le patient est un ingrédient tout comme le renforcement des
compétences du client. Les réussites sont importantes. Une question souvent
posée pour les faire ressurgir est : « Comment avez-vous réussi à faire
cela ? ». Les exceptions aussi sont capitales : un problème n’est
jamais présent dans une vie de façon stable et continue. Il y a toujours des
moments où, par exemple, la personne anxieuse se sent bien ou moins pire. C’est
en se basant sur ces moments que cette personne en arrive à se trouver des
forces, des outils et ainsi appliquer la même recette sur d’autres moments de
sa vie. C’est ainsi que les tâches données au patient prennent formes :
c’est lui-même qui se les trouve. Contrairement à la TSB, ces tâches sont multiples
et optionnelles à chaque rencontre. Une autre différence à noter entre ces deux
méthodes est la définition du problème. Dans la TOS, l’objectif est le point de
mire. La mobilisation du patient ne sera que plus élevée envers cet état
désiré, car il fait partie d’une réalité plausible. Ainsi, le changement devient
presque inévitable. Propre à la TOS, la question miracle permet de bien décrire
l’objectif. Elle demande au client de se projeter et de décrire son futur dans
lequel l’état désiré serait atteint. Pour que le client prenne conscience des
petits changements réalisés en cours de thérapie, l’outil de l’échelle est
régulièrement utilisé. Par exemple, un client qui évalue son émotion à 3/10 et
qui maintenant l’évalue à 5/10 peut devoir
réfléchir sur différents plans : comment il s’y est pris pour atteindre
deux points? À quoi voit-il qu’il en est rendu là? Que faudrait-il pour
atteindre un point de plus? Etc.
Le chapitre six expose les principaux principes derrière la Thérapie narrative. Michel White a
grandement contribué au développement de ce modèle. Encore bien récente dans
les pays francophones, la thérapie narrative s’apparente à la TOS par sa
recherche d’événements positifs dans la vie d’une personne afin d’en faire
ressortir une importance telle que la personne puisse y construire une identité
forte et avoir de nouveau de l’emprise sur sa vie. Les distinctions majeures de
la thérapie narrative sont les réflexions faites sur les intentions de l’action,
sur l’impact social ainsi que les possibilités d’extrapoler sur d’autres
histoires où le problème est absent. Les difficultés vécues chez certaines
personnes sont prédominantes et ont comme conséquence de minimiser les forces
ou les valeurs de cette personne. La jeune fille anxieuse, peu scolarisée et
isolée se cherchant un emploi et qui se bute à plusieurs refus aura tout
avantage à déterrer ses anciennes réussites afin de se construire une image
d’elle concordant avec ses valeurs et l’inspirant à concevoir un avenir
possible. Pour y arriver, les auteurs nous présentent quatre tableaux
différents sur lesquels le thérapeute s’appuie: exceptions, intention et
valeur, principes de vie, relation et reconnaissance. L’histoire
de l’exception, lorsqu’elle est racontée, aborde plusieurs angles. Il est, entre
autre, demandé au client si cette exception a eu des effets sur d’autres
sphères de sa vie, sur lui-même, si ces effets sont satisfaisants et pourquoi
le sont-ils. La prise d’initiative de la part du client est soulignée et a pour
effet de révéler le pouvoir d’action sur la vie de l’individu. Elle est aussi
une porte d’entrée pour souligner ses forces et ses compétences réelles. Dans
un deuxième temps, la recherche des intentions derrière l’action met la
personne en contact avec ses valeurs. Tout au long des rencontres, le
thérapeute demande d’appuyer les dires de la personne avec d’autres histoires
qui corroborent les faits. L’ensemble de ses histoires évoquent donc plusieurs
valeurs qui dressent un ou des principes de vie chers à l’individu. Des
sentiments d’espoir et le goût de construire des projets de vie en lien avec
l’identité de la personne croissent. Finalement, White a exploré l’angle des
relations et l’impact de celles-ci. D’une première façon, il invite le sujet à
parler d’une personne significative dans le passé et de l’influence de celle-ci
sur son image. D’une deuxième façon, il met le client en relation avec une
personne inconnue qui lui renvoie l’image perçue lors de la narration de
l’histoire (reconnaissance).
Le chapitre sept qui s’intitule Script – L’intervention paradoxale progressive, met en lumière une
intervention du Dr. Doutrelugne auprès d’un client consultant afin d’améliorer
la communication familiale. L’entretien est commenté en fonction des notions
préalablement lues et a été sélectionné en raison des erreurs commises de la
part du thérapeute. De prime abord, c’est l’intervention paradoxale qui est démontrée
mais également d’autres outils et concepts tels que le changement, les tâches,
le u-turn, la position basse, la progressivité de l’intervention paradoxale et
l’utilisation. Ce script démontre à quel point l’intervention paradoxale peut
être efficace mais combien difficile à pratiquer. Ici, le thérapeute recevait
ce client depuis plus d’un an, ce qui est rare dans sa pratique (surtout pour
une thérapie dite brève). D’ailleurs, une mise en garde est faite au lecteur,
il est recommandé d’y aller de façon progressive et, de par son côté
provocateur, de toujours faire preuve de bienveillance : les journées où
le thérapeute se sent coléreux, mieux vaut qu’il s’abstienne d’intervenir de
cette façon.
Le chapitre huit expose une autre entrevue « Le pueur de pieds » : dépression majeure, contrat en
blanc de mise au lit et intervention paradoxale progressive. Ce script met
en scène un jeune homme qui a l’impression de puer des pieds, au chômage depuis
trois ans et ayant des signes de dépression majeure. Un contrat en blanc est
l’outil utilisé. L’auteur nous met en garde que cet entretien peut paraître
bien provocant, quoiqu’il ait résulté à un changement. Il demeure qu’à la
lecture, plusieurs constats émergent: il faut oser et user de créativité. De
plus, l’intérêt de supervisions en début d’apprentissage de l’intervention
paradoxale peut certainement favoriser l’habileté.
4.
Pertinence pratique
Par les cas cliniques, les exemples, et la vignette « ce
qu’il faut retenir » à la fin de chaque chapitre, l’ouvrage écrit par Dr.
Doutrelugne et ses collaborateurs est un outil simple pour le conseiller
d’orientation qui veut s’initier aux thérapies brèves. Orienté sur la pratique
et flexible, le lecteur peut facilement appliquer ses apprentissages à son
contexte d’accompagnement. En raison de la clientèle variée (adolescents,
adultes, retraités, ex-détenus…), des milieux où la profession s’exerce
(organisation, scolaire, privée, communautaire…) et des mandats (employabilité,
orientation, réadaptation…), les conseillers d’orientation rencontrent de nombreuses
problématiques desquelles les outils des différents modèles peuvent s’adapter. Pour
en nommer quelques-unes, pensons à la personne accédant à de nouvelles
fonctions lui demandant de gérer des clients difficiles, ou à l’étudiant qui
connaît peu ses forces, ou à la personne accidentée de la route qui doit faire
le deuil de sa profession. De plus, les problèmes relationnels sont fréquents
et présents dans plusieurs contextes. Qu’il s’agisse de conflits récurrents
dans une équipe de travail ou entre deux collègues, les problèmes relationnels
ont des répercussions importantes : baisse de motivation, de rentabilité, du
sentiment d’efficacité personnel, augmentation des absences au travail, etc. En
ce sens, la pratique des thérapies brèves peut s’appliquer auprès d’un groupe
autant qu’auprès d’un individu.
Encore, les théories systémiques brèves, orientées vers les solutions
et narratives se combinent aisément avec les compétences relationnelles
développées chez les conseillers d’orientation. La spécificité est à l’œuvre
lors de la clarification du problème ou de l’objectif. De l’extérieur, il peut
être facile d’apporter nos solutions aux clients, en usant d’empathie, la
réalité subjective du client sera prise en considération et aisément, il y aura
une acceptation des solutions apportées par le client. Utilisée, la
confrontation devient une compétence bien aidante lors de la recherche
d’exceptions, un élément central dans le modèle narratif et de la TOS. Enfin, les
questions ouvertes sont de mise, pensons seulement à la question miracle qui
permet d’ouvrir sur les objectifs et les moyens.
Rencontrer des résistances lors d’un processus de counseling est
fréquent parce que le changement apporte son lot d’appréhension et
d’incertitude. La TSB et TOS apportent une multitude d’outils pour faire face
aux impasses, aux culs-de-sac rencontrés dans les processus de counseling
d’orientation. La théorie des petits pas en est un exemple. Maîtriser
quelques-uns des outils des modèles présentés enrichit le coffre à outil du
professionnel en carriérologie. Donc, sans nécessairement être un puriste de
cette approche, il est pertinent et utile de connaître les outils et concepts.
L’intérêt face aux thérapies brèves est d’autant plus renforcé par
la demande de certaines organisations à réduire le nombre de rencontres auprès
d’une personne afin d’offrir des services à un plus grand nombre de clients. Aussi,
d’après les auteurs, l’efficacité de cette méthode est démontrée. Les deux
scripts à la fin du livre en font foi.
Orientée sur le futur, la TOS explore peu le passé, d’ailleurs, le
problème ne serait pas connu de l’aidant que l’intervention en serait toute
aussi efficace. Donc la phase d’exploration est quelque peu escamotée et la
phase d’action est priorisée. Pour le débutant, l’intervention paradoxale
semble être un art à maîtriser avec doigté. Malgré les trois éléments fournis
par les auteurs pour favoriser la réussite de celle-ci, une bonne analyse de la
situation jumelée à une supervision aurait tout avantage à faire partie de
l’apprentissage du néophyte. De plus, face à ce style d’intervention, il serait
pertinent d’investiguer la réaction chez la clientèle provenant d’autres
cultures qui adoptent des valeurs et des styles de communication différents.
Malgré la bienveillance prônée par les auteurs, se pourrait-il que certaines
personnes réagissent mal devant un thérapeute lui
disant : « Surtout, ne changez rien ! » ?
Tout compte fait, ces modèles ouvrent la voie à de nouvelles
façons de faire et projettent une vision positive auprès du client.
5. Bibliographie
Livres
Doutrelugne,
Y., Cottencin, O. (2005). Thérapies
brèves : outils et applications. France, Paris : Elsevier Masson.
Doutrelugne,
Y., Cottencin, O. (2008). Thérapies
brèves : principes et outils pratiques (2e éd.). France, Paris :
Elsevier Masson.
Doutrelugne,
Y., Cottencin, O. (2009). Thérapies
brèves : situations cliniques. France, Paris : Elsevier Masson.
Doutrelugne, Y., Cottencin, O. et Betbèze, J.
(2013). Thérapie brèves : principes et outils pratiques (3e éd.). France, Paris:
Elsevier Masson.
Sites
Web
Centre de formation en
thérapie brèves et hypnose (2011) Espace
du possible. Récupéré le 8 octobre 2013 de http://www.espace-du-possible.org/
Docteur Yves
Doutrelugne (2009) Récupéré le 8 octobre 2013 de http://www.competencerelationnelle.com
[1] Les informations contenues dans cette section ont été puisées
sur le site internet du docteur Yves Doutrelugne (http://www.competencerelationnelle.com), sur le site internet du centre de formation en
thérapie brèves et hypnose fondé par le Dr. Doutrelugne (http://www.espace-du-possible.org/) ainsi que dans le livre présenté.
[2]
Seule la page du
livre recensé sera citée en référence lorsqu’un extrait sera rapporté.
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